— A Damin (Liaoning) le 14/9, un paysan de 36 ans prénommé Xuwei, vient d’obtenir qu’on lui ôte son nom 苟 Gou, et lui rende celui de 敬 Jing. On le comprend!
Les scribes ont eu beau changer la clé de la bête pour celle de l’herbe, nul n’est dupe : Gou 狗 veut dire chien, triste nom qui lui vaut une vie de chien, comme à ses aïeux. Las de se faire brocarder «maître Chien» par ses élèves, son père avait déjà laissé sa carrière d’instit. Xuwei lui-même n’osa pas monter à la ville chercher fortune comme les copains: de peur des lazzis, amplifiés jusqu’au délire par ce monde de brutes! L’origine de cette épreuve vaut d’être dite : tous les Gou de Chine viennent d’un seul homme, à l’ère des Royaumes Combattants (903-960), assez fou pour insulter le favori de l’Empereur. Pour tout aggraver, il se trouvait partager avec ce dernier une partie de son nom (Jing)! En guise de châtiment, le Fils du Ciel lui offrit le choix: l’extermination, ou le nom infamant! A l’esprit étranger, que le clan ait attendu 1000ans révolus pour rompre la malédiction, est incompréhensible. Et pourtant très logique, en morale confucéenne : l’empereur n’avait-il pas proféré la sentence de 千 古罪人qian gu zui ren, «coupable pour 1000ans»? Signalons enfin qu’en un bizarre rapprochement de l’histoire, depuis Ottawa, le Président Hu Jintao, pensant à Taiwan, vient de réémettre ce verdict précis sur « quiconque diviserait la mère patrie ». Comme quoi en ce pays à la mémoire d’éléphant, rien de nouveau sous le soleil !
Sommaire N° 30