Immense paradoxe que celui de l’enfant chinois, plus gâté qu’en bien des lieux du monde (le jeune shanghaien a plus d’argent de poche que l’adulte!), mais aussi plus abusé!
Pour la Journée nationale de l’enfance (1/6), pour la 1ière fois, la Chine osa poser un regard sans complaisance sur cette face cachée d’elle-même, sous la forme d’un sondage explosif par la Fédération des Femmes, avec le soutien de l’université Beida et l’Unicef auprès de 3500 étudiants de cinq provinces. Même pour des professionnels, les aveux sont éprouvants à lire.
Parmi ces jeunes, 33% des filles, 55% des garçons ont été humiliés, giflés ou frappés. 10 à 13%, furent rossés à répétition avec un objet (trique, ceinture), ou attouchés sexuellement. Tandis que 2% ont subi le viol (ce qui pourrait se traduire, à l’échelle du territoire, par 10 à 15M de viols). Dans 85% des cas, ces actes furent perpétrés par des proches (parents, camarades de classe), et l’entourage, complice, étouffa l’affaire, pour éviter le qu’en dira-t-on !
La violence se tapit partout.
A la maison, on «corrige» l’enfant pour plus d’obéissance et de résultats scolaires. Les violents peuvent aussi être les grands-parents au village—qui frappent les 22M d’enfants abandonnés sans défense par les parents migrés en ville.
A l’école, des bandes pressurent les petits pour de l’argent, ou pour le prestige. Le professeur voit tout, et se tait -quand il ne donne pas l’exemple, comme cette maîtresse ayant tatoué au front d’un élève le caractère zei 贼 (voleur).
Finalement, cette enquête confirme l’acceptation universelle du principe (néo-confucéen) de la «violence formatrice», et la loi du silence. Elle révèle aussi le prix à payer : les jeunes les plus victimisés, sont invariablement ceux qui obtiennent les moins bons scores (faute de concentration et d’énergie personnelle, et de l’estime de soi, perdues sous la torture). Et 10% d’entre eux sont suicidaires.
NB: ces taux de violence sur l’enfance en Chine, ne sont pas sensiblement plus forts qu’ailleurs. La seule différence tenait jusqu’alors à l’absence d’enquête et de débat : voilà un tabou qui vole, et la Chine ouvre une nouvelle page de son histoire !
Sommaire N° 19