— Combien sont les pauvres en Chine?
“50M”, répond le pouvoir, fier d’avoir tiré de la misère 300M d’âmes depuis 1978. Mais Li Shandong, expert au Conseil d’Etat met un bémol : à “moins de 75$/an”, la définition publique place la barre trop bas.
Selon le critère de l’ONU (– d’1$ /j), ce sont 210M de Chinois qui ne mangent pas à leur faim! Or, poursuit Gao Guangsheng, vice directeur à la NDRC (National Development and Reform Commission), l’écart s’approfondit entre Est et Ouest du pays. De 2,1 contre 1 en 1990, il est passé à 3,24 en 2003.
Durant ces 14 ans, en développement relatif, l’Est a monté de l’indice 58,7 à 62,5, l’Ouest baissé de 13,8 à 13,2…
Ce fossé grandissant a son prix. Les pauvres de Chine jaune migrent vers la Chine bleue. D’ici 2020, ils seront 400M à s’être engouffrés dans les villes, surtout vers les deltas du Yangtzé (Shanghai), des Perles (Canton), et le bassin maritime de Bohai (Pékin, Tianjin), 3 régions qui pèsent aujourd’hui 3% du territoire, 12% de la population, 40% du PIB …
Face au monstrueux défi, le pouvoir fait ce qu’il peut : 1,8MM$, en 2004, en programmes anti-pauvreté, 1,2MM$ pour l’école gratuite à 2M d’enfants pauvres… Mais l’alarme lancée montre bien que l’on est loin du compte!
— Début mai 2005, le Président ouzbek I. Karimov lançait la troupe à Andijan en rébellion – 745 morts.
Quinze jours après (25/5), il est l’hôte de Hu Jintao, à Pékin qui “soutient fermement la répression (…) du séparatisme, du terrorisme et de l’extrémisme”. Bien peu occidentale, telle réaction était pourtant prévisible.
Pékin a conscience d’un risque islamiste en Asie centrale, qui vient de renverser le régime modéré d’O. Akaiev au Kirghizstan, et pourrait embraser son Xinjiang ouighour, s’il n’y prenait garde. Pékin croit cette déstabilisation évitable.
D’autre part, depuis 2002 (suite à la guerre afghane), il doit souffrir la présence militaire US dans la région et souhaite y mettre fin. Il s’inquiétait aussi du peu de progrès de la SCO (Security Cooperation Organisation), dit club de Shanghai, l’outil de son influence.
Enfin, ce dont il est question ici aussi, est surtout le grand jeu du pétrole d’Asie Centrale, désormais rare et cher, que tout le monde courtise!Sous tous ces rapports, c’est un grand coup que Pékin frappe, en soutenant le dictateur en difficulté. Coup récompensé sur le champ par un contrat d’hydrocarbures de 600M$ (annoncé le 25/5). Un contrat très politique, du type de ceux remportés au Soudan : c’est dans les moments difficiles que l’on reconnaît les amis—et réciproquement !
Sommaire N° 18