Editorial : France – Chine, le tournant abrupt !

Comme nous l’avions annoncé (VdlC n°4), J.Chirac ne recula devant aucun sacrifice pour réserver, à son hôte Hu Jintao, un séjour de rêve en France. 

Avant son arrivée, il lança 7000 danseurs chinois sur les Champs Elysées (rappel voulu d’ un autre défilé de dissidents au même endroit, le 14/7/89, qui avait ouvert 10 ans de glaciation des rapports bilatéraux). L’ayant accueilli au pied de l’avion à Roissy, il lui ouvrit l’enceinte du Parlement pour un discours rarement offert à des hôtes étrangers. Il pensa à tenir à l’écart l’écrivain français Gao Xingjian, prix Nobel (dissident en exil). Il prononça surtout un discours musclé contre Taiwan, son projet de référendum et ses rêves de «division». C’était une ingérence  dans les affaires de la Chine – mais cette fois elle ne s’en plaindra pas.

Ce spectaculaire rapprochement ranimera forcément une polémique en France, entre partisans d’une diplomatie d’affaires, et ceux de la démocratie avant tout– deux clans traditionnels de la politique française, honorables et complémentaires.

Ce débat est ancien : en 1964, le Général de Gaulle avait lui aussi fermé la porte à Taiwan (son ambassade parisienne), pour reconnaître Pékin. En 1989, inversant la vapeur, Mitterrand avait brisé 25 ans d’amitié sans nuages avec la Chine, et gelé les relations pour 7, voire 10 ans. A présent, le nouveau mot d’ordre élyséen en matière de politique chinoise est de «confiance absolue », et de «laisser le temps au temps pour l’avènement des Droits de l’Homme». Par ce nouveau virage, Chirac éteint toutes les rancoeurs chinoises envers une France « donneuse de leçon », et reconquiert sa place dans le clan des «alliés fidèles».

Les conséquences ne pourront être que fortes. A l’avenir, la Chine pourra se montrer plus ouverte aux produits français (cf ci-dessous). D’autant que Paris est le fer de lance d’une campagne soutenue par la Commission de l’Union Européenne, La Haye, Berlin, pour lever l’embargo européen « démodé » sur les ventes d’armes à la Chine. Dès cet été, Paris devrait pouvoir vendre à l’APL ses bombardiers et frégates, et l’Allemagne, ses sous-marins furtifs – Washington dénonce d’avance la manoeuvre!

Grand perdant, Taiwan voit le sol se dérober sous ses pieds : dans la dénonciation de ses tentatives d’indépendance, l’Europe et la plupart des pays du monde vont suivre. L’île n’a plus qu’un vrai allié (soucieux), les Etats-Unis. L’avenir de Taiwan comme pays, apparaît compromis!

Enfin, ce réchauffement arrive en période de rapports franco-US détestables. Il marque une volonté de rééquilibrage géopolitique, chez des nations inquiètes de la montée en puissance US: un pas vers un monde multipolaire, et une suite naturelle à l’explosion des échanges industriels!

 

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