Chen Shui-bian, Président Taiwanais, a l’art des coups de théâtre.
Le 23/8, son parti DPP, Democratic Progressive Party, indépendantiste fermait la porte à tout référendum (sa « terre promise », pourtant) en votant le projet de l’adversaire KMT, le parti du Kuo Min Tang, plaçant toute réforme constitutionnelle future sous la gouverne du seul Yuan Législatif (Parlement). Le 11/9, il évoque sa démission possible, pour forcer des élections anticipées/groupées le 11/12 (jour du scrutin parlementaire).
Et voilà que le 10 octobre, jour du 55ème anniversaire du régime, il tend la main à Pékin, prêt à négocier «sans conditions », « même sur la question d’une Chine unique ». Conciliant, il offre les liaisons aériennes directes qu’il refusait jusqu’alors – et propose un «code de conduite»… Une halte à la course aux armements… Pourquoi cet appel qui ressemble à un jet d’éponge?
Impuissante, l’île voit son économie phagocytée par le Continent. Déjà 100MM$ de ses investissements et 3M de Taiwanais passés travailler sur l’autre rive… Le revirement de Chen arrive 12heures après la sortie de J. Chirac, aux côtés de Hu Jintao (9/10) : le problème de Taiwan doit être résolu «avec Pékin», dans le cadre du principe pékinois de «1 Pays, 2 systèmes», récusé par Taipei. Chen sait alors qu’il a perdu la bataille de l’Europe, et qu’il faut penser à l’avenir, à l’après-Bush, son seul défenseur.
Enfin, le rusé Président pense à ses législatives. Les nationalistes (en faveur de la réunification) conservent une mince majorité : son offre ôte au KMT son meilleur atout. Et si le DPP pouvait prendre la majorité, il mettrait l’île dans une meilleure position face à Pékin, qu’il forcerait à l’écouter, pour des négociations désormais inéluctables. Face à ces manoeuvres sphyngiennes, on peut comprendre la fin de non- recevoir de Pékin, qui semble penser qu’il est « urgent d’attendre »!
Sommaire N° 33