A la loupe : Tian An Men – le silencieux procès !

Les 3 et 4 juin, le touriste, même chinois, ne pouvait deviner le 15éme anniversaire des événements de la place Tian An Men.

En cette nuit du 3/4 juin 1989, des éléments des 27 et 38ème corps d’armée avaient repris Pékin agitée depuis 6 semaines par 200.000 étudiants réclamant la démocratie. Des 100aines voire des milliers de jeunes avaient trouvé la mort. Avaient suivi 15000 arrestations et une répression sans faille jusqu’à ce jour : 300 à 500 jeunes sont en prison, dont 27 journalistes et  61 webmasters.

Pour que ce jour-phare se fonde dans l’anonymat, un effort énorme a été déployé : des 10aines de dissidents assignés à résidence, y compris le vieux docteur Jiang Yanyong (le révélateur du SRAS), disparu après avoir réclamé une révision de l’avis officiel, pour qui «l’intervention fut appropriée, pour préserver l’unité et la stabilité du pays ». Même l’expression de la date du 4 juin (六四) est proscrite.

Au sommet,  aucune concession n’est possible : Pékin tente de conjurer son silencieux procès.

Autant dire qu’en dépit du contrôle adamantin des medias, des écoles et de la rue, l’opération d’amnésie collective n’a pas abouti. En morale chinoise, les souvenirs tragiques ne  trouvent le repos qu’après échange : pensée étayée par les nouveaux besoins en communication, indispensable pour que la Chine maîtrise ses monstres de l’avenir, SIDA et pollution par exemple… A prix exorbitant et sans profit, la Chine paie simplement le renforcement exponentiel de sa chape de silence.

Pourtant, dans un débat de fond, le régime ne serait pas sans arguments solides à présenter: depuis 1989, le niveau de vie a été sextuplé, 400M de gens sont sortis de la misère. Mais peut-être est-ce avant tout une question de discipline de Parti: tant que subsiste un seul veto, la vieille ligne se maintient…

L’enjeu, est celui du modèle social d’avenir. Tout en Chine a été réformé sauf la structure publique. Le pouvoir caresse le rêve, aujourd’hui toujours plausible, d’un modèle asiatique qui supplante la démocratie participative à l’occidentale, en combinant technocratie, absolutisme et jaozi 饺子-raviolis!

 

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