Petit Peuple : Daling, trois villages en ung

Daling avait tout pour faire un village sans histoire.

Mais en 1957, le cadastreur en décida autrement, en plaçant arbitrairement en son milieu la frontière triangulaire entre Pékin, Tianjin et le Hebei. En l’épicentre, gît la ferme des Jia, écartelée.

Dans la maison de l’Ouest, Jingfu le cadet (76 ans) et Jingbao le benjamin sont Pékinois (arrondissement de Pinggu).

5 mètres plus à l’Est, Jingsheng l’aîné se retrouve Tianjinois.

Toutes leurs vies ont été chamboulées. Des lois locales défendues bec et ongles, induisent des prix, règlements et chances inégaux. Au téléphone portable, pour que Jia appelle Jia, les appels sont invariablement interurbains -ruineux: suivant le temps qu’il fait, suivant que l’on parle de la cuisine ou de la chambre, c’est le pylône le plus puissant qui impose son réseau…

Généralement parlant, c’est la tribu de Jingfu et Jingmao qui s’en sort le mieux : pas de taxes illégales, l’eau et l’électricité avant tout le monde,de meilleures routes, plus d’usines font que le revenu moyen est supérieur de 1500¥. Donc, pas question pour les filles de Daling (Tianjin), de baisser les yeux sur les garçons des voisins : il ne leur faut que les gars de Daling (Pékin), pas moins.

Même drame à l’école : à moins d’allonger 80¥/ mois, les mômes de Tianjin ne peuvent fréquenter l’école du village, à 150m, et doivent marcher tous les jours 8km!

Finalement, la situation n’a qu’un seul (maigre) avantage pour tous : en coeur, le clan des Jia a opté pour enregistrer ses voitures au nom d’un cousin dans le Hebei, moins cher et moins procédurier. Quand au journaliste ayant déniché ce merveilleux pataquès, il fait remarquer, non sans finesse, que 鸡鸣三省 ji ming san sheng, chaque matin, le même coq chante sur les trois provinces !

 

 

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