Le 15/10, la Chine entière vécut rivée sur la TV, suivant les révolutions de son vaisseau spatial Shenzhou-V, à Jiuquan (Gansu) Juste avant le départ, le pilote Yang Liwei avait été salué par le Prsdt Hu Jintao, sans Jiang Zemin, l’auteur du projet. Lieutenant-colonel de l’APL, Yang, 38 ans, était le fils d’un petit comptable et d’une institutrice du Liaoning –région ruinée. A ce titre, il était l’image même de l’espoir chinois, parti de rien pour monter un beau matin, après des décennies de labeur, « dans les étoiles » !
La date du décollage, 12h après la fin du Plenum n’était pas innocente : cet événement médiatique permit de gommer un changement de cap, sur lequel Pékin ne souhaitait pas s’étendre.
En 21 h., Shenzhou-V fit 14 tours de la terre, à 335 km de distance. Le lanceur Longue Marche CZ 2F était le plus puissant jamais produit en Chine (480t charge utile), et la capsule la plus lourde sur terre (8t). Le 16/10 comme prévu, la cabine se posa en douceur, freinée par parachute, sur la plaine désertique, dans l’aube mauve mongole.
Le coût de Shenzhou est lourd : 2MM$/an. Sans apporter d’acquis scientifique ou militaire nouveaux — s’agissant du remake d’une expérience vieille de 35 ans. Dans ces conditions, pourquoi un tel effort? « Dans un but éducatif », dit Gu Yidong, patron du programme. Voire de prestige, comme le fit aux US des années ’60, le programme Apollo. Juste après, un haut cadre déclara cette mission “aussi significative dans l’histoire du pays, que son 1er tir de fusée (1970) ou son 1er tir nucléaire (1964)”!
Mais Shenzhou est aussi un programme à long terme. Shenzhou.-V sera suivi
1. d’exercices de rendez-vous
2. et d’arrimage,
3. d’une station permanente, puis
4. d’une base lunaire.
Dans une rare franchise, ses responsables avouent un pessimisme sur l’avenir, inattendu dans ce pays officiellement fidèle au matérialisme historique : vu la promiscuité et la pollution immense de la terre, le seul espoir de l’humanité est de se transplanter ailleurs. L’objectif est donc, d’abord, l’exploitation des richesses spatiales. Pour M. Gu Yidong, l’espace est une « base minière, énergétique et industrielle idéale, vu sa pureté et l’absence de gravité ».
En agronomie (très vif intérêt pour la Chine, rurale), il permet la germination sous rayonnement spatial, avec pour résultat des semences meilleures.
En industrie, l’espace permet déjà la production de semi-conducteurs, céramique, verre optique et alliages.
Enfin, selon M. Gu, les US auraient tiré 2MMM$ de l’espace, pour un investissement destiné à atteindre 600MM$ d’ici 2010. Avec ses 16 satellites récupérés depuis 1975, la Chine se voit bien suivre la même voie!
Sommaire N° 33