Editorial : SRAS – la victoire sera chinoise ou ne sera pas!

Face à l’épidémie virale qui déferle sur la Chine, après le renvoi de deux hauts cadres (20/4, cf dernier n° du VDLC), Hu Jintao créa une cellule de crise aux pouvoirs étendus, sous la direction de Mme Wu Yi, vice 1er ministre, également nommée nouveau ministre de la santé.

Un plan de crise doté de 2,4 MM$ a été lancé, inspiré par l’OMS, à travers l’ensemble du territoire.  Il n’était que temps : l’épidémie ne pouvait plus être cachée, avec (au 26/4) 988 cas dans Pékin, pour 48 morts et 2.753 dans 19 provinces, pour 122 morts.

Tirés des 50 hôpitaux locaux (23/4), malades et suspects ont été regroupés hors de Pékin, sur des hauteurs de Miaofengshan ou à Shunyi. 17 hôpitaux (depuis le 26/4) sont spécialisés dans l’accueil des  nouveaux cas. Le 24, les écoles pékinoises ont été fermées, et rouvriront le 7/5 (2 jours après le LFP, dont les pertes, selon JP Raffarin, seront comblées par Paris, « de manière à assurer sa pérennité ». JP Raffarin annonce aussi des crédits pour deux nouveaux lycées à Pékin et Shanghai, doublant leur capacité).

Le 25/04, maçons, paysans et étudiants furent interdits de quitter la ville. Des milliers de gens ont été placés en quarantaine, souvent contre leur gré. Les bars de Pékin ferment l’un après l’autre, « volontairement, 15 jours pour nettoyage » : Pékin entière est consignée, avec des M de gens confinés chez eux, entrées et sorties, trains et avions sous contrôle. La peur était évidente, cohue pour quitter la ville, et magasins dévalisés de leurs denrées. Le pouvoir (25/4) multiplia les appels au calme, rappelant que « l’approvisionnement ne posait aucun problème, sauf de délai d’acheminement ».

NB : la peur des chinois est culturelle, et concerne moins le SRAS, reconnu comme peu létal, que la quarantaine, comme l’explique cette intellectuelle : « la quarantaine est infamante. Y être astreint, vous rend coupable d’une différence, et laisse des stigmates à long terme, auprès de nos collègues, voisins, parents et amis! »

Etrange contradiction que cette population sereine quand le moment était à s’inquiéter, et vice versa !

Des inspections furent envoyées dans 17 provinces, et tous les gouverneurs, convoqués à Pékin, furent requis sous peine de limogeage de préparer les hôpitaux, assurer l’admission de tous les malades (gratuit si nécessaire) et garantir la transparence de l’information. Ce qui est en jeu selon Wolfgang Preiser, chef de la mission OMS à Shanghai : « si l’humanité ne parvient pas à endiguer le SRAS en Chine, elle aura perdu toute chance de tuer le virus dans l’oeuf et d’empêcher sa diffusion ailleurs sur la planète! ». L’épidémie gagnerait vers l’intérieur, Shanxi notamment (Taiyuan, sa capitale,  durement touchée, et des dizaines de cas reportés à Xingu, ville minière à 30km).

Par ailleurs, au plan politique, des questions apparaissent au sein du monde chinois.

[1] Le limogeage du min. de la Santé Zhang Wenkang et du maire de Pékin Meng Xuenong intrigue. Ami de Hu Jintao, Meng (53ans) aurait critiqué début 2003 l’anarchie du SRAS à Canton -offensant Li Changchun, ex-Secr. de la province, juste promu au Comité permanent, et protégé de Jiang Zemin. Dans ce climat, on peut entrevoir comment Meng dut subir des attaques «de plusieurs fronts», et assumer seul le poids du désastre pékinois, quoiqu’en règle socialiste, le véritable maître de la ville soit le Secr. du PCC Liu Qi, qui n’a pas été inquiété. Commentaire de JP Raffarin : « le fusible n’a pas été remplacé par un autre, mais la responsabilité est montée droit au sommet, à Hu Jintao en personne« .

[2] De Canton, suite à une fuite, la presse révèle que l’épidémie fut notifiée à Pékin le 8 février, qui ordonna le 10 de tout traiter par la censure et le silence. Qui donna l’ordre? Avec l’accord du Président?

[3] Le 1er malade du SRAS fut interné à Pékin le 1er mars – en secret, pour ne pas déranger le Plenum de l’ANP. Selon l’OMS, « le mois de mars fut perdu pour l’humanité, dans la lutte contre le SRAS ».  De toute évidence, des comptes seront réclamés, par l’étranger, au niveau des clubs d’investisseurs et de l’OMS, par l’opinion qui gronde et s’éveille, voire à l’intérieur du Parti, entre factions rivales qui observent un silence malaisé.

NB : pour combattre le SRAS, la transparence et la concertation, seuls nouveaux outils désormais utilisables, portent en Occident un autre nom : démocratie. Qu’en fera-t-on, après la tempête?

 

 

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