Editorial : editorial_40_2001

Pékin étale aux quatre horizons ses chantiers, visibles depuis n’importe quelle tour. La plus grande opération immobilière de l’histoire bat son plein, dans une des métropoles les plus antiques, avec une échéance: les JO de 2008!

Pour le vice-maire Wang Guangtao, il y a urgence à reloger 1,2M de gens. Mal construit, le  siheyuan traditionnel est insalubre et surpeuplé ((jusqu’à 1 habitant/m²). On rase donc tout, pour ériger des HLM garantissant 15m²  par habitant, à 1660$/m² (25% du prix réel). En revanche, le terrain est exproprié à prix très bas… Selon la mairie, 70% des résidents devraient revenir. 50% max., selon d’autres: sur les 13M de résidents actuels, seuls 6,5M vivront à l’intérieur du 4ème périphérique, les autres en banlieue.

Par cette démolition concernant jusqu’à 60% de la capitale, des surfaces sans précédent sont libérées, de quoi multiplier les quartiers d’affaires tels le «Green» des JO aux tours jumelles (510m), et une zone de luxe sur Zhongguancun (Haidian). Avec 1,5Mm² construits, elle délogera 170 000 habitants pour la plupart chercheurs, dont 20% de pensionnés. Le Pékin futur s’offre une forte remise à niveau technique : adduction du gaz qui remplacera le charbon, fermeture des aciéries et de toute usine en ville, percement de 15 lignes de métro (dont une ligne Maglev, en négociation avec la RFA) et de deux gares multimodales, plantation d’une muraille d’arbres pour arrêter les vents chargés de sable du Gobi.

Pékin veut protéger 37% de la ville historique, classés en 25 zones. ponts de marbre, temples, sections de muraille Qing, douves et lacs sont restaurés sans lésiner sur la tuile vernissée ni la brique bleue – la mairie y investit 2,7 MMY, sans compter les crédits de l’Etat. 100 000 monuments sont dénombrés, tel le Palais d’Eté, placé sous le patronage de l’UNESCO -tous ne seront pas sauvés !

Mais pour le professeur Zhu Zuxi, expert en urbanisme ancien, la méthode du sauvetage de vestiges-îlots dans un océan de béton n’a pas de sens : « La merveille architecturale de Pékin, qui lui donne une place à part dans le monde, n’est pas la Cité Interdite, mais le plan mongol de 1275, dessiné par le moine taoïste Liu Bingzhong sur demande de Kubilai Khan. Tout y est à sa place, rappel constant à un cadre de valeurs esthétiques et morales. Pour une ville si fragile, aucune restauration n’est satisfaisante : il faudrait transférer ailleurs la capitale. »

 

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