La mystérieuse apparition de 10000 manifestants du Falungong le 25 avril place Tian An Men, a éveillé l’attention publique sur les sectes qui fourmillent en ce pays – conséquence de l’absence de liberté de culte et de la clandestinité qui en résulte. Dernière secte épinglée : Zhu Shen (« l’Esprit Seigneur »), dont le leader charismatique Liu Jiaguo vient d’être arrêté dans le Hunan après plus de deux ans de cavale.
A travers 22 provinces, Zhu Shen comptait plus de 10000 adeptes, tous soumis à la dîme, y compris, pour les belles fidèles, au don de leur corps au prédicateur. Il prônait un culte syncrétique chrétien appelant au renversement du pouvoir politique, à remplacer par le « Royaume de Dieu ». M. Liu connaissait ses mâtines : avant de fonder Zhu Shen, il avait créé une autre secte, dite du « Roi élu ».
Pensionné à 54 ans en 1979, au sortir de 10 ans de Révolution Culturelle, Wang Ruchen entama la réalisation d’un vieux rêve : participer au « reboisement de l’âme humaine », en envoyant des jeunes aux études. Pour ce faire, avec un pragmatisme bien chinois, il commença par placer les économies de toute sa vie, dans un restaurant dont les profits alimentèrent sa « fondation ». L’argent alla d’abord à une maternelle, puis, à partir de 1986, aux jeunes les plus prometteurs.
Palmarès, 13 ans plus tard : 40 jeunes ont pu grâce à lui étudier, dont 10 en université. Le problème, qui chagrine très légitimement le vieillard – M. Wang a aujourd’hui 84 ans : pas un seul des bénéficiaires de son mécénat n’est venu lui dire le petit mot « xie xie » (merci). Aussi incroyable que cela puisse paraître, M. Wang n’avait jamais vu ses boursiers, qu’il sélectionnait sur dossier. Voilà comment Wang Ruchen, Père Goriot chinois des temps modernes attend toujours une photo, une lettre ou une visite, qui annihile les soupçons qui le taraudent : ce silence est-il fruit d’ingratitude, ou d’escroquerie ?
Sommaire N° 20