A 42 ans, He Qinglian, journaliste et maître en économie, devient phare de son époque, éclairant ses lecteurs (du pouvoir, comme de la rue), sur l’évolution du pays, aussi tumultueuse et trouble que le Yangtzé de cet été.
Avec les 8 éditions pirates, son livre, les pièges de la modernisation () s’est vendu en 10 mois à 3M d’exemplaires.
Son message : une analyse rigoureuse, avec appareil de notes et chiffres, de l’appropriation par une classe de fonctionnaires, d’une part importante du patrimoine public, la croissance des mafias, liées au pouvoir, et de la montée de la colère des dépossédés (tels ces quelques dizaines d’ex-riverains de Tian An Men, qui manifestaient hier devant la mairie de Pékin, après avoir été bannis à la campagne pour laisser place à des fructueux chantiers).
Le pouvoir, non seulement n’a pas embastillé l’auteur, mais l’a aidé à se faire publier, et invité à se faire entendre dans un colloque.
Réaction qui « récompense » son écriture prudente, critiquant système mais non Parti – évitant le piège, auquel trop de gens succombent en Chine, du « complexe de Zorro ». Preuve qu’il y a aujourd’hui une place au sommet de l’appareil, pour le dialogue et la confrontation. Mais le diagnostic de Mme He Qinglian demeure inquiétant : «il ne fait pas de doute qu‘à l’avenir, l’échange de l"argent contre le pouvoir, la collusion des cadres et des mafias, les exodes intérieurs et les émeutes, seront les grandes racines de la crise sociale».
Sommaire N° 35