Ce lundi 9 septembre marque le 20.anniversaire de la mort de Mao Zedong : bon moment, 20 ans après, pour en évaluer l’écrasant héritage -fait du meilleur et du pire!
Le pire : de 1958 à 1961, entre 30 à 60 millions de paysans sont morts de faim lors du « Grand Bond en avant ».
Jasper Becker, dans « Hungry ghosts » (éditions John Murray, ’96), explique comment : en imposant des méthodes agricoles « scientifiques-intuitives », en réalité non démontrées et farfelues, tel le « labour profond » (2 m!) et le « repiquage serré (12x plus que normal) ; en confisquant la totalité des récoltes (sous prétexte que celles-ci auraient été 20 fois supérieures à la normale); en éliminant tout opposant; et en se bouchant les oreilles, à Pékin, sur la famine.
La raison fondamentale de cette hystérie collective imposée d’en haut, étant la certitude du Grand Timonier dans la capacité de la Chine, après 8 ans de socialisme à dépasser l’URSS et entrer la première, dans la voie du « communisme ». Comme « pire », il faudrait aussi citer les catastrophiques années de Révolution Culturelle, instiguée par Mao pour reprendre le pouvoir à ses adversaires (Liu Shaoqi, Deng Xiaoping) qui l’avaient mis en minorité après l’affaire du « Grand Bond ».
Le meilleur : même pour les critiques inconditionnels du régime, le bilan est impressionnant.
Mao, avec son ordre de fer, a réunifié le pays, chassant colonialistes et envahisseurs; redistribué les terres aux paysans; créé partout un réseau d’usines, d’écoles-universités, d’hôpitaux, de services (eau, gaz, électricité, postes, routes) frustes, mais opérationnels… Mao Zedong a jeté les bases, qui n’existaient pas avant, d’une ouverture à l’Occident, d’égal à égal, et de la croissance actuelle.
Mao s’est aussi fondu, tout naturellement, dans la position traditionnelle suprême de pouvoir, celle de l’Empereur. D’où, symboliquement, sa volonté d’occuper une partie de la Cité Interdite et, jusqu’à la fin de sa vie, son formidable appétit sexuel, assouvi par des cohortes de petites paysannes du Hunan ou du Shanxi…
Aujourd’hui faute d’une « démaoïsation » après sa mort, Mao reste très présent dans la pensée politique : le Président Jiang Zemin se réfère à lui, plutôt qu’à Deng, et voudrait notamment recréer, pour lui-même, le poste de « Président du Parti ».
Mao Zedong conserve aussi un fort capital de sympathie auprès du peuple: des jeunes qui ne l’ont pas connu et qui cultivent la nostalgie d’une période égalitaire et « pure », comme des vieux passent sur leurs souffrances et leurs morts, au nom du mandat des Dieux!
Sommaire N° 33