Sujet N°1 de la rentrée en Chine : l’effritement du niveau de vie des citadins, salariés et « getihu » (indépendants).
Taxis, vendeuses et « xiaojie » (serveuses) des restaurants le disent : les affaires, depuis 3 mois, ont baissé, faute de moyens. Les appartements neufs ont perdu leurs listes d’attente – les jeunes loups retournent vivre chez papa-maman!
Responsables de la crise : la lutte contre l’inflation. Gagnée (le taux, cette année, ne dépassera pas 8%, contre plus de 14% en 1995), mais au détriment de la consommation. Responsable aussi : la « crise de croissance » de l’économie chinoise!
L’avenir n’a guère de promesses en stock : dans les mines, les industries légères, le textile, partout, le maître-mot est « globalisation ». Pour résister à la concurrence, qui n’existait pas il y a 5 ans, il faut dégraisser : à travers le pays, des millions d’employés perdront leurs places sous 12 mois, parmi les plus âgés et les moins dynamiques, rejoignant le club humilié des nouveaux pauvres.
D’ici 1998, le pouvoir s’y est résigné, 500 000 PME, toutes premières réalisations de la Révolution seront « restructurées », vendues -au mieux, au personnel, au pire, à l’encan. Viendra ensuite le plat de résistance, les grandes industries publiques, elles aussi déficitaires 11MMUSD de pertes en 95. Coincé entre les perspectives d’inflation débridée, ou de cassure de la croissance, le pouvoir n’a guère de marge, et se garde de faire du zèle : son véritable problème, aujourd’hui, est ailleurs, dans sa propre succession!
Un incident, cette semaine, donne la mesure du désarroi, et du « vol à vue » de certaines administrations: en trois sites à Pékin, la police a délogé en pleine nuit des centaines d’étrangers -dans un cas, émanant de 48 pays, dont les propriétaires n’avaient pas reçu la licence « étrangers ». Jusqu’alors, la police avait fermé les yeux. Leurs loyers, 500-2000 USD /m, étaient de 2 à 5 fois plus bas que ceux des compagnies habilitées (elles-mêmes proches du pouvoir). La rumeur, dans Pékin, attribue la paternité de l’opération aux promoteurs du complexe Yayuncun (le plus grand en ville, à moitié vide), qui aurait demandé à la police de lui rendre ce « petit service »
– contre dédommagement. Mesure qu’on ne peut définir que d’irréaliste (puisqu’elle compromet le séjour de ces professionnels occidentaux à petit budget), et en contradiction avec le slogan n°1 du régime, « ouvrir le pays, ouvrir les esprits »!
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