Le Politbureau aux champs!
Depuis avril, une frénésie de déplacements s’est emparée du Politbureau – une dizaine de missions vers une quinzaine de provinces, et (pour les 4 ou 5 ténors) vers autant de pays étrangers… Les plus récents : Jiang Zemin rentre de 6 pays africains et de Zhuhai, Zhu Rongji se trouve en Malaisie…
Pourquoi tout cela? Dépêcher les hauts cadres dans les provinces est une démarche exceptionnelle destinée à s’assurer de la fidélité du leadership local. En mai ’89, Deng Xiaoping avait adressé un télex comminatoire aux 30 Gouverneurs et 1ers secrétaires, aux Commandants des régions militaires, leur demandant de choisir entre Zhao Ziyang (qui voulait une réforme politique) et lui. Après l’éviction du 1er Secrétaire, en ’90-91, le nouveau leadership au complet s’était montré dans les provinces pour raffermir cette discipline encore fragile.
Aujourd’hui, même technique. Mais contrairement aux missions disciplinaires d’il y a 5 ans, à défaut d’autres finalités annoncées ou discernables, ces missions des grands commis semblent répondre à des motivations personnelles – le « chacun pour soi », et la collecte de voix, dans la lutte pour le pouvoir. Les voyages à l’étranger procèdent de la même logique : on se rend dans les capitales pour s’y faire reconnaître, notamment en exprimant un message politique trop iconoclaste pour être dit à Pékin -c’est ce que Qiaoshi, Président de l’A.N.P. – le Parlement chinois, a fait au Canada en annonçant que « la réforme politique n’avait jamais cessé en Chine ». En tout cas, ces voyages par tous les leaders chinois indiquent la volonté de ne pas abandonner « aux autres », le terrain des relations internationales.
Du « directoire »actuel, 3 hommes se dégagent, susceptibles d’être le leader de demain : Jiang Zemin, Li Peng, et Qiaoshi. Avec sa campagne depuis 6 mois, visant à placer l’idéologie avant toute chose, Jiang commence à éprouver un effet de « patinage » – les structures obéissent, mais dans l’abstrait et sans effet. Li a recueilli les fruits de la normalisation française. Et Qiao réitère aujourd’hui sa demande audacieuse de pouvoirs de contrôle du Parlement sur les décisions centrales -la séparation du Parti et de l’Etat.
De tout cela, une seule conclusion s’impose : entre les thèses de Jiang Zemin et de Qiaoshi, même si les 2 hommes sont, et peuvent rester longtemps encore en alliance tactique, sur le fond, aucune réconciliation n’apparaît possible!
Sommaire N° 22