Blog : Mon invitation au voyage : « Tibet, dernier cri »

Mon invitation au voyage : « Tibet, dernier cri »

Eric Laurent JokhangUn voyage exceptionnel au Tibet

Tibet, dernier cri est la chronique du voyage qui m’a mené sur le Toit du Monde, du 20 septembre au 4 octobre 2008.
J’ai été le premier journaliste autorisé à retourner au Tibet après les émeutes des 14-16 mars 2008, pour un voyage autonome où l’on m’a laissé le choix de l’itinéraire. Je crois même avoir été l’un des seuls au monde à bénéficier de ce droit, en tout cas le seul francophone. Ce genre de visite au Tibet est donc tout à fait exceptionnel.

Pourquoi ce privilège ? Personne n’a pu ou voulu me l’expliquer. J’ai en Chine la réputation d’un professionnel mesuré et indépendant, pour avoir travaillé sur ce terrain sans interruption depuis 1987, présentant le pays dans ses défauts, ses qualités et, avant tout, ses différences. Il est possible que la Chine ait besoin aujourd’hui de faire évoluer l’image du Tibet en France, ce qui l’aurait disposée à y laisser entrer un enquêteur connu pour sa neutralité, disposant d’une écoute dans l’opinion hexagonale.

Avec les trois compagnons choisis pour ces quinze jours de découverte, une fois à Lhassa et tout au long de notre voyage, nous avons été soumis à une surveillance sévère. En revanche, nous avons eu droit à des entretiens habituellement inaccessibles, nous ouvrant la visite de l’université et de l’école locale, de l’hôpital de médecine traditionnelle, des systèmes d’irrigation ou de protection de l’environnement. Nous avons aussi vu les principaux monastères et sanctuaires tibétains, et même la paroisse musulmane millénaire « kachi ».
Le soir, au hasard des rues et grâce à nos contacts téléphoniques, nous rencontrions la société « réelle », d’origine han ou tibétaine, et, relativement plus libres de nos mouvements, nous avons eu affaire à des rencontres exceptionnelles et des témoignages parfois contradictoires.

Le livre ‘Tibet, dernier cri ‘

Pour exploiter ces sources riches et complexes qui m’ont demandé un an de recherches et d’écriture, j’ai choisi la forme d’un journal de bord reprenant chaque étape du voyage, les deux jours de train depuis Pékin, les huit jours de visite et d’entretiens à Lhassa, les trois jours entre Shigatsé et Ganzi, l’escapade au lac Namtso.

Tibet, dernier cri est écrit à la façon des grands reportages, pour faire vivre un dépaysement. Une échappée belle dans un sanctuaire naturel, et se découvre la magie ample et prenante qui saisit l’homme, entre lac et neiges éternelles. Les contrastes permanents que donne à voir ce peuple favorisent des morceaux de bravoure, entre moments pittoresques et situations de tension extrême. D’un côté la truculence des soirées entre vieux Tibétains, qui s’amusent en chantant et en se tirant la langue, signe d’amitié. De l’autre les portraits au scalpel de staliniens, depuis longtemps disparus de Pékin, qui survivent au Tibet, préservés par le froid de haute altitude.

Enfin Tibet, dernier cri permet un décryptage politique, à commencer par celui de la Chine, puissance occupante, en mettant en question la pertinence des thèses extrêmes. Celles de l’occupant Han, de bonne volonté mais autoritaire, matérialiste, trop convaincu d’apporter le progrès et la civilisation à un Tibet inculte. Et celles d’un Tibet de l’exil, légitime dans sa dénonciation des manquements aux Droits de l’homme, mais trop souvent prêt à diaboliser la Chine dans tout ce qu’elle tente de faire du pays des neiges. Alors que, à ce que j’en comprends, les deux grandes erreurs de l’occupant sont de vouloir faire trop vite et de ne pas rechercher la participation des Tibétains aux décisions qui les concernent.
Mon livre montre le Tibétain tiraillé entre ces deux types de pensée, fragilisé, réaliste, mais pas dupe. Il met aussi en lumière l’incapacité chinoise à tenir la promesse d’un de ses dirigeants en 1981 (voir l’exergue du livre) d’octroyer au Toit du Monde autodétermination et droit à la différence. D’où le risque, perçu de plus en plus cruellement par la population, de perdre sa culture.

D’où aussi le titre à double sens de ce livre. On comprendra facilement que l’expression « dernier cri » se réfère à un engouement de plus en plus marqué dans le monde (et en Chine) pour un Tibet magique, mais bien sûr aussi à l’agonie d’une culture vivant ses dernières années.
Une telle confrontation, sous la force des armes, entre la spiritualité naturelle des Tibétains et le matérialisme technocratique des chinois Hans, sera-t-elle la source de décennies de guérilla, style Irlande du Nord ou Pays Basque espagnol, ou bien celle d’une synthèse potentiellement enrichissante pour l’Europe en quête de refondation ?

Lequel de ces deux avenirs prévaudra, la vie ou la mort ? J’ai quant à moi l’intuition que le Tibet peut sortir renforcé de l’épreuve et qu’il montre d’ailleurs dès aujourd’hui les bourgeons de sa renaissance à venir, mais loin de moi l’idée de faire autorité là-dessus. A tout le moins, ce livre espère relancer le débat sur une des régions mondiales qui suscite le plus de réactions contradictoires, en France comme ailleurs. Il nourrira en tout cas le lecteur en rêves, en valeurs et en émotions hors du commun.

Ci-joint l’article paru dans Actuphoto le 3 avril 2013 :  Tibet, dernier cri fait partie de ces beaux ouvrages qui amènent le lecteur à réfléchir, mais également à rêver. Ce récit incroyable livre l’expérience rare qu’ont vécu le photographe Laurent Zylberman, passionné par les problématiques liées au territoire…
http://actuphoto.com/24511-laquo-nbsp-tibet-dernier-cri-nbsp-raquo-nbsp-laurent-zylberman-et-eric-meyer-presentent-leur-tibet.html

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  1. juanita castro

    Eric, comment faire pour avoir ton libre sur le Tibet??? Il va falloir aller chez toi le recuperer?? ou…….que vous veniez chez moi l’apporter.
    Besos!!!!
    Juanita

  2. Anne-Claire

    Je vois qu’une conférence est prévue à Shanghai…les pékinois auront ils également une conférence sur « Tibet Dernier Cri » ? A moins que par étourderie je ne l’aie déjà loupée…

  3. Le Vent de la Chine

    Chère Juanita, Tibet, ultimo grito ! vient de sortir à Barcelone – là vraiment, on va venir te l’apporter 🙂
    Chère Anne-Claire, tu n’as rien loupé du tout ! La conférence pékinoise de Tibet, dernier cri ! est en cours de programmation. Affaire à suivre….!

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