Comme de tradition, à guichets fermés, le 15. Congrès a été le cadre de débats d’une démocratie réelle, où le PCC s’est livré à une évaluation franche des chances de la semi privatisation des Entreprises d’Etat.
On y a entendu des critiques sur la lenteur de la réforme politique, et même (anathème!) des doutes sur les vertus universelles de la Théorie de Deng. Une lettre ouverte attribuée à Zhao Ziyang, leader réformateur disgracié en juin 1989, a circulé sous le manteau, réclamant la révision du jugement officiel («soulèvement contre-révolutionnaire») sur le printemps de Pékin. On a pu entendre ce slogan dans un groupe de travail : «Libérer les pensées, dynamiter les tabous, surfer sur la vague de l’inconnu». Des bruits de couloirs prêtaient à l’Assemblée le loisir de compléter les listes d’éligibles, à concurrence de 10% -du jamais vu… Mais lors des votes, face à la presse, c’était la fin de la récré: discipline du Parti, 2048 voix pour, «0» contre.
A l’issue du Congrès, la Théorie de Deng a été enchâssée dans la Charte du PCC, aux côtés d’une autre relique: la Pensée de Mao.
Selon des sources hongkongais, la chute de Qiaoshi résulterait d’un complot: vu l’incapacité de l’appareil à s’entendre sur des listes de candidats aux organes suprêmes, un Politbureau «élargi» à la 20aine de membres du Comité des Conseillers (organe créé dans les années ’80 pour «recaser» les vieux révolutionnaires) aurait été réuni à la hâte au milieu du 15. Congrès. Ce meeting se serait penché sur la question de la limite d’âge. Jiang, 71 ans, aurait offert sa démission, pour se l’entendre refuser par les octogénaires, Bo Yibo en tête. Suite à quoi Qiaoshi, pris de court, n’aurait plus eu d’autre choix que de remettre sa démission. Cette même technique de Politbureau élargi, quoique anticonstitutionnelle, avait été inaugurée en juin ’89 pour limoger le 1er Secrétaire Zhao Ziyang.
Certaines provinces, dans le jeu des nominations au Politbureau, s’en tirent mieux que d’autres : le Henan (Li Changchun), le Shandong (Wu Guanzhen), Canton (qui sauve son Secrétaire du Parti Xie Fei, et place même son vice Secrétaire Lu Ruihua), tandis que Shanghai, la ville de Jiang, fait entrer son maire Xu Kuangdi.
Zhu Rongji prépare dès maintenant, pour soumission à l’ANP en mars 1998, une refonte des ministères et Comm. d’État, sans précédent dans l’histoire du régime. Corollaire indispensable de la réforme des Entreprises d’Etat (le démantèlement de leurs autorités de tutelle). Profil recherché pour les futurs (vice) ministres: 40 ans, pratique de l’ordinateur, expérience de direction bancaire ou boursière, et style «hongkongais» des affaires.
Parmi les dangers identifiés pour la Chine, par la Banque mondiale: 289000 morts d’asthme (tribut aux infâmes fumées industrielles du pays), 600 000 dans 22 ans (sauf mesures dramatiques); une charge sociale la plus forte de toute l’Asie, due à une sénescence brutale, conséquence de la politique de l’enfant unique; et une montée en flèche des coûts d’éducation et de santé, interdisant l’enrichissement des zones enclavées et reculées. Mais pour la Banque, le choix politique du 15. Congrès, prendre à bras le corps la réforme des Entreprises d’Etat, est un gage de succès!
111 Tibétains graciés, dont 2 politiques. Le Dalai Lama remercie. Embellie?
La bataille entre les 2 Chine pour la reconnaissance diplomatique dans le monde ne se relâche pas, même pour cause de 15. Congrès. Chaque année à cette époque, Taiwan «demande» à ses 30 pays alliés (en échange de son soutien financier) de l’aider dans sa démarche de retour à l’ONU (Organisation des Nations Unies): Guatemala et République Dominicaine viennent de s’abstenir, et Pékin les a chaleureusement félicité. Le Guatemala jure ses grands Dieux qu’il ne pense pas à un renversement d’alliance.
Sommaire N° 32