– 270000 soldats et (wujing, police armée), 8 M de civils, sur la brèche depuis juillet.
– 1,56 MMY alloués au renforcement des défenses du bas Fleuve Jaune (Shandong)
– 200 000t de légumes frais en cours de livraison dans les zones sinistrées;
– Déstockage de blé et riz en cours, et circulaires pour prévenir la spéculation;
– Appel aux donations : déjà reçus, 325M USD, dont 1,3 (Aciéries Shougang), 0,25 (USA), 0,1 (Corée/Nord), 0,4 (Espagne), 10 (CICR), 32 (différentes fédérations industrielles), 0,3 (don personnel de Tony Blair, 1er Min Britannique); 0,1 de Taiwan, qui retient l’argent en attendant de savoir sa destination.
– Les assurances ont remboursé vite et fort leurs clients, essentiellement industriels: au 20 août, 120 MUSD (sur des demandes d’indemnisation de 360M); ce qui a permis à 4300 PME de redémarrer. Avant l’arrivée des flots, la PICC avait (non sans bon sens) financé l’évacuation de nombre de ses usines clientes, permettant de minimiser le sinistre. Mais cette intervention est limitée par le faible taux d’assurés: dans le Guangdong, 57 firmes assurées par la PICC (=80% du marché), sur 2000 existantes!
–NB: si vous souhaitez faire des dons: cf Ministère des affaires civiles, téléphone (Pékin) 65251532, n°cpte bancaire RMB A/C 469-330145090 (Everbright Bink of China, Beijing Branch); besoins urgents en antibiotiques, désinfectants, anti-venins, eau capsulée.
PROPAGANDE
« L‘eau emporte bien des choses, mais pas le courage », « nous menons notre plus grande guerre, depuis celle contre le KMT »… « L’Armée Populaire de Libération (APL), notre grande muraille d’acier »…
De telles formules triomphalistes abondent dans la presse officielle des dernières semaines. Pour le régime, une fois certain de la qualité de ses préparatifs, l’événement est apparu comme une chance unique d’une campagne de propagande unique en son genre, appuyée sur le concret: (shi shi qiu shi, « rechercher la vérité à travers les faits », devise chère à Deng Xiaoping).
On voit l’histoire des 112 héroïques généraux sur le front aqueux, l’un passant 10 h les pieds dans l’eau, des jours sans dormir, et se tenant éveillé en croquant des gousses d’ail; l’autre, malgré sa grosse fièvre, gardant le cap, et refusant un bon lit pour rester avec les sinistrés et avec ses troupes, sur la digue…
L’image se dégageant de cette littérature, étant celle de compétence, de courage, d’égalitarisme et de service du peuple. Cette même presse thuriféraire exprime la reconnaissance des masses envers son armée (sentiment qui épongerait, dans la mémoire collective, le souvenir du rôle de l’Armée Populaire de Libération (APL) dans la suppression du Printemps de Pékin): innombrables clichés de paysannes cuisant la soupe sur un brasero de fortune, pour des soldats épuisés, et l’on trouve même ce morceau de bravoure d’une jeune mère, faisant jaillir le lait de son sein, pour soulager les piqûres de frelons aux dos des recrues!
UNE REALITE PLUS NUANCEE
Si l’armée, indiscutablement, s’est bien comportée (elle était prête), cette campagne anti-inondation n’en a pas moins connu quelques bavures. Suivent quelques exemples, tous tirés de la presse chinoise:
– à Lindian (Jilin), 5 officiels cassés pour abandon de poste, durant 4 heures, pour jouer au mahjong.
– cadres ayant fui leur poste, et/ou confisqué des véhicules pour évacuer leur famille;
– à Harbin, Liu Xiaoqiang a été arrêté pour avoir fabriqué des bouées qui à l’usage, coulaient, tandis qu’une charcuterie industrielle s’est fait saisir 117000Y de profits mal acquis : elle avait doublé ses prix avec l’arrivée des eaux;
– à Auxian (Hunan), des cadres arrivés en renfort exigent de bons lits, la meilleure chère et à boire, pour mieux sauver les masses : 100000Y de frais pour les sinistrés;
– à Harbin, le 15 août, un paysan convoyant un camion de pierres vers le front fluvial, se fait arrêter par un certain Qin-le-5ème frère, mi-bandit, mi-policier, et sur son refus de lui verser 100Y d’octroi, se fait rosser -blessure au foie.
-en règle générale, Pékin vient d’interdire les missions dites de solidarité ou de consolation, ainsi que tout acte de prévarication ou main basse sur l’argent des donations.
DIVERS
– Parmi les évacuations d’urgence, figurent des articles imprévus: des espèces animales menacées, dont quelques dizaines de tigres de Sibérie, sauvages, qu’il a fallu capturer (sans armes!) et 100 Cerfs de David ; tandis que les 10 000 pensionnaires du pénitencier de Sifangtuozi (Jilin) ont été relogés en lieu sûr -pas une seule «belle» à déplorer.
– lors de son Congrès annuel, l’église taoïste a trouvé une belle occasion de faire montre de patriotisme, en sacrifiant 470000USD sur l’autel de la cause nationale.
QUELLES SUITES?
Dans l’immédiat, priorité au retour à la normalité.
Pour les industriels, production avant tout.
Chez DCAC/Wuhan, 180 ouvriers sur les 5000 de la JV Citroën ont été affectés à la surveillance des digues, jour et nuit -la rivière Han, est 3 m plus haute que l’usine. Dans les deux sens, les livraisons se font par camion et non plus par barge, et un effort financier exceptionnel a été consenti en faveur des PME d’ensembliers, afin de leur permettre de produire leurs pièces détachées. En juillet, 3849 véhicules étaient produits, soit +67%, la montée en puissance prévue au cahier de charges (de 30000» ZX-Fukang à 50000 cette année), n’a pas été remise en cause.
Pour les écoles, la consigne est d’ouvrir à la date prévue –1er septembre. Plus facile à dire qu’à faire: 1MMUSD de dégâts dans 45000 écoles, 3Mm² détruits et 7 endommagés, 8,5M d’élèves sinistrés, sans livres ni tableaux noirs… Ainsi à Sangzhi (Hunan), 77% des 473 coles sont détruites: 50% des enfants seront à la porte. De toute manière, vue la ruine des familles sinistrées, et le besoin de mettre les enfants au travail, les proviseurs s’attendent au plus fort taux d’absentéisme des 20 dernières années.
Les inondations, d’après m. Zhou Wenzhi, ministre de l’eau, se poursuivront encore au moins jusqu’à fin octobre, voire fin de l’année, si de nouveaux typhons interviennent.
L’impact économique sera évidemment négatif. «pas si lourd», disent ces experts, estimant que la croissance industrielle au 3. trimestre pâtira, mais pour mieux rebondir au 4., sous l’effet des investissements publics d’infrastructures du 1er semestre, qui ont gonflé et culminé en juillet (+22,8%). Selon ces mêmes voix, l’impact agricole serait limité, puisque les inondations ne concernent que 5% du terroir nat’l. D’autres voix sont plus pessimistes, tel celle de l’économiste Hu Angang qui prédit une croissance de PNB limitée à 7,3% (en dessous des 8% promis par Zhu Rongji). Tel Jiang Zemin lui même qui vient de concéder que l’objectif des 8% risque de ne pas être atteint. Zhu lui, persiste et signe.
AUTOCRITIQUE
Selon une pratique rituelle du Parti, la Chine fait sa (ziwopiping, autocritique), refusant de se satisfaire de l’idée que «c’est la faute au destin».
Le Vice 1er Min. Wen Jiabao en personne, face au bureau du Parlement (l’ANP), dénonce les «négligences dans le domaine de l’environnement…, la déforestation massive».
Les langues de la presse se délient (mais pourquoi si tard?) : le système anti-crues était «souvent obsolète et dilapidé, hors d’usage normal, dans 420 des 600 villes à risque». Les investissements étaient «beaucoup trop bas depuis longtemps… +21% /an depuis 1991, mais atteignant dans la période tout juste 115MMY, soit 1% des dépenses globales d’infrastructures depuis 6 ans»!
Conséquences annoncées : dès à présent, l’exploitation forestière au Tibet, comme ailleurs sur les rives des fleuves, est interdite.
Des investissements «considérables» vont être faits pour remettre à jour le réseau fluvial. Et l’Etat propose de racheter aux paysans les terres des bassins d’écoulement, pour les rendre à leur mission initiale, celle d’absorption du trop plein des crues. Une question cependant demeure sans réponse: comment ce système, si capable aujourd’hui de fustiger les carences de 20 ans -et que chacun connaissait sans vouloir le dire-, saura t’il prévenir d’autres accidents de ce type à l’avenir?
Sommaire N° 27