Le Vent de la Chine Numéro 1 (2022)
Comme nombre de ses homologues à travers le monde, le Président Xi Jinping a présenté ses vœux pour la nouvelle année dans une allocution télévisée le 31 décembre, sa neuvième depuis 2014.
Comme chaque année, les internautes ont tenté de percer « le mystère Xi Jinping » en se prêtant au « jeu des sept erreurs » qui consiste à distinguer les différences dans la décoration du bureau présidentiel par rapport à l’année précédente.
Résultat : 13 photos ont fait leur apparition sur les étagères du Président, retraçant les moments (idéologiquement) forts de l’année passée : Xi Jinping, le poing levé, prêtant serment de fidélité au Parti ; Xi Jinping donnant un discours historique à l’occasion du centenaire du Parti ; Xi Jinping remettant la médaille du 1er juillet au Grand Palais du Peuple…
Mais le leader chinois se présente également comme un homme attaché aux valeurs familiales : un cliché de son épouse Peng Liyuan, dans la fleur de l’âge, devant un piano, ainsi qu’un portrait de famille avec ses parents, ont été exposés.
Dans sa bibliothèque, outre les œuvres complètes de Lu Xun, « Das Kapital » de Karl Marx et « Le Capital au XXIe siècle » de Thomas Piketty, le « compendium des règles internes au Parti » a fait son apparition, en un nouvel avertissement aux corrompus.
Bien décidé à promouvoir les Jeux Olympiques d’hiver à Pékin (4 au 20 février) malgré les boycotts diplomatiques dont ils sont la cible, le Président a placé les deux mascottes de l’évènement sur l’une de ses étagères. « Le monde tourne son regard vers la Chine, et la Chine est prête », a-t-il fièrement déclaré.
Dans son allocution d’une quinzaine de minutes, le leader a présenté 2021 comme une année d’une « signification exceptionnelle ». Il faisait par-là référence au 100ème anniversaire du Parti Communiste Chinois célébré en fanfare sur la place Tian An Men le 1er juillet, à la 3ème résolution historique adoptée lors du 6ème Plenum du Comité Central, à l’éradication de la grande pauvreté ou encore au doublement du PIB par habitant en une décennie.
Accompagné d’une rétrospective vidéo de ses inspections en province, Xi Jinping s’est présenté comme un leader proche du peuple. « Ayant moi-même vécu en campagne, je sais exactement ce que la pauvreté veut dire », a-t-il confessé, en une allusion à ses sept années passées à Liangjiahe, un village perdu dans le Shaanxi, durant la Révolution culturelle.
Xi Jinping a ensuite énuméré les « histoires chinoises » qui l’ont fait vibrer en 2021 : les chants des jeunes patriotes jurant de rendre « le pays plus fort » ; l’atterrissage du rover Zhurong sur Mars ; le lancement de Tianhe, module central de la station spatiale chinoise ; les performances des sportifs chinois lors des Jeux Olympiques de Tokyo ; la mobilisation héroïque de la population face aux désastres que le pays a connus (inondations…) ; la nation restée unie face à la Covid-19…
Quoique le pays connaisse à Xi’an un rebond épidémique qui rappelle sous certains aspects les prémices de l’épidémie à Wuhan début 2020 (confinement strict, campagnes massives de dépistage, difficultés d’approvisionnement, désinfections des espaces publics à grande échelle) et que les congés du Nouvel An chinois seront perturbés par la Covid-19 pour la troisième année consécutive, le Président a souligné les résultats de la Chine en matière sanitaire, et a déclaré avoir reçu des louanges de dirigeants étrangers pour la contribution de la Chine dans la lutte contre le virus.
Traditionnellement, Hong Kong, Macao et Taïwan sont toujours mentionnés dans les vœux. Si Xi Jinping a rappelé l’importance de la mise en œuvre du principe « d’un pays, deux systèmes » dans les deux régions administratives spéciales (RAS), le dirigeant a une fois de plus, affirmé que la réunification de la patrie est « une aspiration partagée des deux côtés du détroit de Taïwan ». Quelques jours plus tôt, le porte-parole du bureau des affaires taïwanaises Ma Xiaoguang a déclaré que Pékin prendrait des « mesures drastiques » en cas de « provocations des forces séparatistes ». Dans ses vœux interposés, la Présidente Tsai Ing-wen a mis en garde Pékin contre tout « aventurisme militaire » et appelé à trouver « des solutions pacifiques ».
Étrangement, le leader n’a pas dit un mot sur le 20ème Congrès du Parti qui sera pourtant l’événement politique majeur de l’année 2022… Le 1er janvier, le journal du Parti, Qiushi, a publié un discours donné par Xi Jinping lors du 6ème Plenum, exigeant « une unité de fer » et « une loyauté absolue » des membres du Parti tout en promettant d’enquêter rigoureusement sur les « cliques politiques » qui sévissent en son sein. Quelques jours plus tôt, lors de la dernière réunion du Politburo de 2021, le Secrétaire Général du Parti a exhorté les autres dirigeants à « obéir aux arrangements organisationnels », ce qui laisse entendre que cela n’est peut-être pas entièrement le cas…
Et à l’inverse des allocutions précédentes, Xi Jinping n’a pas mentionné le taux d’augmentation du PIB, alors que l’économie chinoise fait face à de nombreux vents contraires… Réaliste, Xi Jinping a tenu à rappeler que « réaliser le grand renouveau de la nation chinoise ne sera pas tâche facile » et « n’arrivera pas du jour au lendemain ». « Nous devons toujours garder une perspective de long terme tout en demeurant attentifs aux risques potentiels », a-t-il ajouté.
Enfin, cadeau de fin d’année aux expatriés et aux multinationales : les déductions fiscales de certains avantages (prime au logement, frais de scolarité des enfants) qui devaient prendre fin le 31 décembre 2021, seront finalement prolongées de deux ans. De quoi bien débuter l’année 2022 !
La station spatiale chinoise est passée à moins de 4 kilomètres de la catastrophe. Selon Pékin, cette dernière a dû effectuer à deux reprises ces six derniers mois, des manœuvres pour éviter une collision en orbite basse (moins de 550 km de la surface terrestre) avec deux des 1900 satellites du constructeur américain Starlink.
Cette méga-constellation, qui devrait atteindre les 12 000 puis les 42 000 satellites à terme, est destinée à fournir une connexion internet dans des zones reculées. C’est un des principaux projets d’Elon Musk, aux côtés des voitures électriques Tesla et des vols spatiaux de SpaceX.
Indignée par la « grave menace » que ces engins ont fait planer sur la vie de ses trois taïkonautes à bord de la station spatiale chinoise, la Chine a porté l’affaire devant le Bureau des affaires spatiales de l’ONU début décembre, accusant les États-Unis de « manquer à leurs obligations internationales ».
Si les autorités chinoises n’ont pas explicitement mentionné Elon Musk dans leurs réclamations, le milliardaire américain, pourtant très populaire dans l’Empire du Milieu, n’a pas été épargné par les internautes chinois. « Ça ne manque pas d’ironie : les Chinois achètent des Tesla, donnant de l’argent à Musk pour qu’il lance des satellites et les jette contre la station spatiale chinoise », pointait l’un d’entre eux. La menace d’un boycott plane sur Tesla, qui réalise un quart de ses ventes mondiales en Chine.
Ce n’est pas la première fois que les satellites Starlink font l’objet de récriminations. Outre la lumière réfléchie par leurs panneaux qui nuirait à l’observation spatiale, le 44ème satellite Starlink avait également frôlé début septembre 2019 le satellite européen Aeolus, censé améliorer les mesures de la vitesse du vent. La possibilité d’une collision était alors d’une sur 1000, dix fois plus que lorsque l’Agence Spatiale Européenne (ESA) avait adressé sa première alerte à SpaceX quelques jours plus tôt – sans effet sur la trajectoire du Starlink 44…
Ces collisions évitées de justesse mettent en avant l’absence de réglementation internationale pour gérer ce genre de situation.
Selon l’Université britannique de Southampton, les satellites d’Elon Musk sont impliqués dans environ 1 600 rencontres rapprochées (moins d’un kilomètre) entre deux engins spatiaux (la plupart du temps d’autres satellites Starlink) chaque semaine, soit la moitié des incidents de ce type.
Même si SpaceX a affirmé avoir « ajusté » les orbites de ses satellites afin de réduire la possibilité de collisions, le risque qu’un tel événement se produise ne cesse de s’accroître à chaque nouveau lancement.
C’est sans compter sur les dizaines de milliers de « débris orbitaux » qui encombrent l’orbite basse de la Terre. Mi-novembre, cette problématique a suscité l’attention mondiale après un tir d’essai d’un missile anti-satellite par la Russie sur un de ses anciens appareils encore en orbite. La destruction de l’objet a provoqué la création d’un nuage de débris menaçant la station spatiale internationale (ISS). La Chine elle-même a procédé à un tir similaire en 2007, à l’origine de nombreux débris.
La question de l’augmentation des débris spatiaux pourrait devenir aussi cruciale que celle du réchauffement climatique, à en croire certains experts. Au fur et à mesure que l’espace disponible se réduit sur certaines orbites convoitées, les tensions entre les États-Unis et la Chine, les deux pays aux programmes spatiaux les plus actifs, sont amenées à augmenter. Pékin blâmera les USA pour les « vieux déversements », tandis que Washington condamnera la Chine pour les déchets « récents ».
Cette même thématique avait donné lieu à un échange de reproches entre Pékin et Washington il y a quelques mois. En mai 2021, la Maison-Blanche avait dénoncé la « négligence » de la Chine, qui a laissé s’écraser sur Terre 10 tonnes de débris de la fusée Long March 5B. Un mois plus tôt, c’était un lâcher dans l’espace de plus de trois tonnes de détritus par la station internationale (ISS), qui suscitait l’ire de la Chine.
Malheureusement, cette concurrence fait obstacle à toute coopération internationale autour du problème des débris spatiaux et de leur nettoyage, en partie parce que les technologies de suivi ont des applications militaires…
Dans un tel contexte, on peut s’interroger sur la manière dont Elon Musk compte s’y prendre pour continuer à vendre autant de Tesla en Chine tout en mettant au point pour le compte du Pentagone un satellite capable de détecter les nouveaux missiles hypersoniques de l’Armée Populaire de Libération.
Moins connues que les « parachutes dorés », voici les « participations dorées » (黄金股份 ; huángjīn gǔfèn) ! C’est le nom donné aux prises de participation minoritaires (environ 1%) de l’État dans des compagnies privées. Elles sont qualifiées de « dorées » car elles sont souvent accompagnées d’un siège au conseil d’administration ou/et d’un droit de véto sur certaines décisions stratégiques du groupe – chose extrêmement rare pour une participation de seulement 1%.
Ce système ne date pas d’hier. En 2016, Pékin l’a appliqué aux entreprises générant ou rediffusant du contenu en ligne. Aujourd’hui inquiet pour sa « sécurité nationale », l’État a décidé d’y avoir recours pour garder la haute main sur les entreprises privées qui détiennent des quantités importantes de données.
Les péripéties de l’application de courtes vidéos TikTok aux États-Unis sous l’ère Trump, et le passage en force du leader des VTC, Didi Chuxing, en bourse de New York, n’ont fait que conforter Pékin de la nécessité d’avoir recours à ces « actions préférentielles ».
D’après Wu Xiaoling, ancien directeur du bureau de recherches de la Banque Centrale, ce système présente l’avantage de protéger l’intérêt public tout en préservant l’indépendance des firmes.
Le cas de la maison-mère de TikTok, Bytedance, est éclairant. Fin avril, la licorne a révélé avoir cédé 1% de ses parts fin 2019 à un fonds d’investissement (WTZW) contrôlé par le China Internet Investment Fund (CIIF), lui-même dirigé par l’administration nationale du cyberespace (CAC). Cette cession inclut une clause qui permet à un dirigeant de WTZW de siéger au conseil d’administration de ByteDance. Même si le directeur de WTZW (un ancien de la CAC) n’assiste que très rarement aux réunions, c’est un rappel permanent que les autorités peuvent intervenir à tout moment. En échange, Bytedance aurait obtenu plus facilement les licences d’exploitation pour ses agrégateurs de contenu.
Bytedance n’est pas la seule société à avoir été ainsi « investie » par l’État. Les autorités auraient également pris des parts de son rival Kuaishou ainsi que d’autres plateformes comme Ximalaya (équivalent chinois de Spotify) et Full Truck Alliance (le Uber du transport routier). Le gouvernement serait également en pourparlers avec Didi Chuxing dans le cadre d’une restructuration plus large de l’entreprise, après lui avoir ordonné de se retirer de Wall Street.
Dans la plupart des cas, aucune information ne filtre sur ces « participations dorées » jusqu’à ce qu’elles soient enregistrées publiquement, souvent plus d’un an plus tard… Il est donc difficile d’évaluer à ce jour le nombre d’entreprises dans lesquelles le gouvernement chinois a des « parts dorées », en particulier dans celles qui sont cotées aux États-Unis. Une opacité qui n’est pas du goût du régulateur boursier américain (SEC).
En parallèle de ces « actions préférentielles », la tutelle boursière chinoise (CSRC) vient de durcir les conditions de cotation en bourse à l’étranger pour ses entreprises. Désormais, toute entreprise souhaitant lever des fonds hors frontières devra s’enregistrer auprès de la CSRC. Cette dernière examinera les projets de cotation et se coordonnera avec d’autres agences gouvernementales, comme la CAC, pour s’assurer que les firmes respectent bien les lois chinoises, notamment en matière de sécurité des données.
Contrairement aux rumeurs, la CSCR ne compte pas interdire aux entreprises chinoises structurées en « entités à intérêt variable » (VIE) de lever des fonds à l’étranger, si elles sont en conformité. Cette structure juridique a permis, en deux décennies, à plus de 500 compagnies chinoises de contourner les restrictions du gouvernement chinois en matière d’investissements étrangers.
Le gouvernement aura donc le pouvoir d’empêcher les entreprises de se faire coter à l’étranger s’il estime que le projet menace la « sécurité nationale ». Ce faisant, il met un terme à une faille juridique qui avait permis à Didi Chuxing de passer outre les recommandations de la CAC.
La tendance est nette : « participations dorées », cotations à l’étranger… Pékin ne laisse plus rien au hasard !
Coup de tonnerre dans le monde de l’e-commerce. Viya (薇娅), la « reine » des ventes en live-streaming, a été épinglée le 20 décembre par le bureau des taxes de la ville de Hangzhou pour avoir dissimulé des revenus et fait de fausses déclarations en 2019 et 2020.
Le montant de l’amende, qui comprend le recouvrement des impôts ainsi que des pénalités de retard, est astronomique : 1,34 milliard de yuans (185 millions d’euros). Il s’agit de la plus grosse pénalité infligée ces dernières années à une célébrité. Même l’actrice Fan Bingbing n’avait dû s’acquitter « que » de 883 millions de yuans pour avoir fraudé le fisc en 2018.
Dans son dernier post Weibo, la jeune femme de 36 ans a battu sa coulpe : « je m’excuse sincèrement auprès de la société et des personnes qui m’ont toujours soutenue (…) j’accepte consciencieusement la punition infligée par les autorités fiscales », a-t-elle écrit. Le lendemain, tous ses comptes sur les réseaux sociaux ont été supprimés ou suspendus. Un lynchage en règle s’ensuivit, mené par la presse d’État ainsi que la chaine de télévision CCTV.
Fin novembre, deux autres influenceurs, Cherie et Lin ShanShan, ont également été frappés par l’administration fiscale d’amendes de plusieurs dizaines de millions de yuans, avant d’être blacklistés de la toile… Selon Xinhua, plus d’un millier d’autres live-streamers, craignant d’être les prochains sur la liste, ont pris les devants et ont déclaré leurs véritables revenus au fisc. Les retardataires avaient jusqu’au 31 décembre pour se mettre en règle, sous peine de sanctions.
La suspension de Viya, figure emblématique du « télé-achat » 2.0, est un nouveau coup dur pour le géant du e-commerce Alibaba, qui compte essentiellement sur ces animateurs stars pour défendre sa position de leader du shopping en ligne face à de redoutables compétiteurs tels que Douyin, Pinduoduo et Kuaishou.
Originaire d’une famille de commerçants de l’Anhui, Huang Wei – de son vrai nom – monte à Pékin alors qu’elle n’a que 16 ans et devient vendeuse dans un marché de gros près du zoo. Passionnée de chant, elle remporte l’émission de téléréalité « Super Idol » en 2005. Faute de perspectives dans la chanson, elle décide d’ouvrir plusieurs boutiques de vêtements à Xi’an avec son mari. C’est par hasard qu’elle se pique d’intérêt pour le e-commerce et se met à vendre en ligne. En 2016, Taobao la remarque et lui propose d’animer une émission en live.
Grâce à ses talents de vendeuse, son show devient rapidement le plus populaire de la plateforme. En trois ans, ses ventes ont été multipliées par quinze, de 2,7 milliards de yuans en 2018 à 38,6 milliards en 2020, sur lesquelles Viya et son équipe de production perçoivent une commission d’environ 30%. Désormais richissime, Viya a réussi à échapper à un impôt sur le revenu qui peut s’élever jusqu’à 45% en ouvrant de nombreuses sociétés-écrans. Si les gouvernements locaux ont longtemps fermé les yeux sur cette combine très répandue dans le secteur, le ralentissement économique actuel – en particulier du marché immobilier – les a conduits à mettre un terme à ce laxisme fiscal, de manière à compenser leur baisse de revenus.
À travers la disgrâce de Viya, c’est le sort de toute l’industrie du live-streaming qui est en jeu. En seulement quelques années, le secteur s’est développé à une vitesse incroyable, pour représenter 2000 milliards de yuans en 2021 (+90%). Selon les calculs du Global Times, les 20 animateurs les plus populaires, dont Viya et « le roi du rouge à lèvres » Austin Li, ont réalisé pour 106 milliards de yuans de chiffres d’affaires en 2020. Lors du lancement du festival du 11.11, Viya et Austin Li ont réalisé pour 19 milliards de yuans de ventes en seulement 24h.
Cette concentration des profits dans les mains de quelques-uns déplait fortement au leadership, qui ambitionne de mieux redistribuer les richesses et de réduire les inégalités, objectifs résumés par le concept de « prospérité commune ».
L’État considère également que les dérives associées à la croissance de l’industrie (chiffres de ventes fabriqués, publicité mensongère, contrefaçons, violation des droits des consommateurs…) sont la conséquence d’une « expansion désordonnée des capitaux », et « vampirise » l’économie réelle.
Néanmoins, cet avertissement adressé au secteur ne veut pas nécessairement dire que le gouvernement veut le voir disparaître, mais plutôt le voir mieux régulé. En attendant, les quelques centaines de milliers de jeunes Chinois qui se sont lancés dans le live-streaming dans l’espoir de gagner leurs vies, retiennent leur souffle…
30,2% : c’est le taux de participation lors des élections du LegCo (Conseil législatif) à Hong Kong, le plus faible depuis deux décennies (43,6% en 2000). La cheffe de l’exécutif Carrie Lam, y voit « la preuve du soutien du public pour la réforme du système électoral ». Depuis le triomphe du camp pro-démocratie lors des élections de district fin 2019 (taux de participation de 71%), Pékin a imposé une loi de sécurité nationale assortie d’une réforme en profondeur du système électoral.
Sur les 90 sièges du LegCo, seuls 20 sont désormais pourvus au suffrage universel, moitié moins qu’auparavant. Les autres membres du LegCo sont désignés par divers comités et corporations professionnelles majoritairement pro-Pékin. Tous les candidats sont filtrés en amont par un comité évaluant leur « loyauté » au régime chinois. Résultat : 89 des délégués sont issus du camp « pro-Pékin », avec un seul « modéré ».
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80 milliards de $ : c’est le montant que les 10 Chinois les plus riches ont perdu cette année, selon le classement Bloomberg Billionaires. Cela représente un quart de leur richesse totale, soit la plus grande baisse depuis la création de l’index en 2012. C’est le fondateur de Pinduoduo, Colin Huang, qui a perdu le plus en 2021, voyant s’évaporer 42,9 milliards de $ (deux tiers de sa fortune) avec la chute de 70% de l’action de sa société. Jack Ma, le fondateur du géant du e-commerce Alibaba qui fait profil bas depuis la suspension de l’introduction en bourse d’Ant Group en 2020, a perdu lui, 13 milliards de $. La fortune du PDG de Didi Chuxing Cheng Wei, a elle, été divisée par quatre depuis l’introduction avortée de sa compagnie en bourse de New York, de 6,7 milliards de $ à 1,7 milliard de $.
Ce revers de fortune tient au changement d’attitude de Pékin vis-à-vis de ses géants de la tech et de ses fondateurs, dont la réussite cadre mal avec le nouveau mot d’ordre de « prospérité commune ». Face à cette reprise en main, les patrons d’au moins cinq de ces entreprises (Alibaba, Pinduoduo, ByteDance, Kuaishou, JD.com) ont préféré démissionner de leurs fonctions.
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14 000 (petits) développeurs de jeux vidéo et autres firmes liées au secteur ont mis la clé sous la porte depuis juillet 2021, selon le Securities Daily. Ce chiffre est en forte augmentation par rapport aux 18 000 fermetures sur toute l’année 2020. Même les géants du secteur, comme ByteDance, Baidu, Tanwan Games, Tencent et NetEase, ont été obligés de procéder à des licenciements et de se réorienter vers les marchés étrangers.
En cause, le gel de la mise sur le marché de nouveaux jeux vidéo depuis six mois, le plus long hiatus depuis 2018. En temps normal, entre 80 et 100 jeux sont approuvés chaque mois. Les autorités n’ont fourni aucune explication officielle sur les raisons de cette interruption, ni une éventuelle date de reprise. Au mois de mars, le Président Xi Jinping avait décrété que le pays devait lutter contre l’addiction des jeunes aux jeux vidéo.
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La taille de la marine française tous les 4 ans : c’est la vitesse à laquelle l’Armée Populaire de Libération (APL) augmente la taille de sa marine, d’après le vice-amiral allemand Kay-Achim Schonbach. La puissance navale croissante de la Chine est « explosive et préoccupante », a déclaré le chef de la marine allemande, tout en exhortant Pékin à suivre les règles internationales. D’ici 2025, l’APL devrait disposer d’une flotte d’au moins 70 sous-marins.
- Bureau : 办公室; bàngōngshì
- Bibliothèque : 书架; shūjià
- Mignon, adorable : 可爱; kě’ài
- Mascotte : 吉祥物 ; jíxiáng wù
今年习主席办公室的书架上又有了新变化,除了13张首次摆上书架的照片,还有两个可爱的吉祥物。
Jīnnián xí zhǔxí bàngōngshì de shūjià shàng yòu yǒule xīn biànhuà, chúle 13 zhāng shǒucì bǎi shàng shūjià de zhàopiàn, hái yǒu liǎng gè kě’ài de jíxiáng wù.
« Cette année, il y a eu de nouveaux changements dans la bibliothèque du bureau du Président Xi. En plus des 13 photos posées sur la bibliothèque , il y a aussi deux adorables mascottes ».
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- Elon Musk : 埃隆·马斯克 ; Āilóng · Mǎsīkè
- Starlink : 星链 ; xīngliàn
- Projet, plan, programme : 计划; jìhuà
- Objectif, cible : 目标; mùbiāo
- Construire : 建设; jiànshè
- Orbite : 轨道; guǐdào
- (Un) satellite : (一颗)卫星; (yī kē) wèixīng
- Énorme, méga : 庞大; pángdà
星链计划目标是在近地轨道建设一个庞大的卫星群。
Xīng liàn jìhuà mùbiāo shì zài jìn dì guǐdào jiànshè yīgè pángdà de wèixīng qún.
« L’objectif du projet Starlink est de construire une mega-constellation de satellites en orbite terrestre basse ».
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- Gouvernement : 政府; zhèngfǔ
- Action, participation dorée : 黄金股份; huángjīn gǔfèn
- (Société) privée : 民营 ; mínyíng
- Internet : 网络; wǎngluò
- Media : 媒体; méitǐ
- (Une) entreprise : (一家)公司; (yī jiā) gōngsī
中国政府在大约五年前开始在民营网络媒体公司中持有黄金股份。
Zhōngguó zhèngfǔ zài dàyuē wǔ nián qián kāishǐ zài mínyíng wǎngluò méitǐ gōngsī zhōng chí yǒu huángjīn gǔfèn.
« Le gouvernement chinois a commencé il y a environ cinq ans à prendre des « participations dorées » dans des sociétés privées de médias en ligne ».
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- Eluder l’impôt, la taxe : 逃税; táoshuì
- Être puni, pénalisé : 处罚; chǔfá
- 100 millions : 亿; yì
薇娅偷逃税被追缴处罚13.41亿元。
Wēi yà tōu táoshuì bèi zhuījiǎo chǔfá 13.41 yì yuán.
« Wei Ya a été punie pour évasion fiscale d’une amende de 1,341 milliard de yuans ».
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- Mourir, rendre son dernier souffle : 一命呜呼; yī mìng wū hū
是癌症使他一命呜呼的。
Shì áizhèng shǐ tā yīmìngwūhū de.
« C’est le cancer qui l’a tué ».
À 23 heures, Zhang se leva du fauteuil qu’il occupait au salon face à la bow-window de la villa, et se dirigea vers le corridor, l’escalier, les étages pour visiter pièce par pièce la maison entière. Ce faisant, il filmait en panorama tout ce qui défilait devant l’objectif de son téléphone. Cette tâche expédiée, il envoya par réseau 4G les prises à deux adresses, celles de l’agence et celle du client, agrémentées du commentaire bref et concis RAS, « rien à signaler ». C’était la troisième fois qu’il répétait la manœuvre depuis son arrivée en début de soirée en cette splendide construction de style virginien, sise à Nanyang dans la province du Henan.
Elle avait fière allure cette résidence, avec sa terrasse de grès en damier noir et blanc et sa façade en demi-cercle flanquée de deux colonnes grecques ornant l’entrée monumentale. Toutefois, son manque d’entretien depuis des années, sous la Lune de la nuit, donnait au tableau une teinte moins sereine, presque lugubre… Le jardin notamment, autrefois un parc à la française, était retourné à l’état sauvage, avec ses buissons non taillés et son haut tapis de mauvaises herbes, d’arbousiers et jujubiers aux branchages anarchiques.
Dans le dossier fourni par l’agence, Zhang avait lu l’histoire mouvementée de la demeure coloniale. Bâtie dans les années 30 pour un riche importateur américain, elle avait été confisquée par le général de l’Armée populaire de libération en charge de la zone. En faisant occuper le site par ses soldats, il l’avait soufflée au secrétaire municipal du Parti qui la guignait de longue date, mais n’avait rien pu faire, occupation valant titre. Au début des années 90, les fils du général l’avaient revendue à très bon prix à un nouveau riche, qui l’avait faite restaurer avant de la léguer à son tour, 25 ans plus tard, à son fils en 2015.
Un jour de janvier 2018 aux petites heures, ledit fils, éternel noceur et joueur invétéré, s’était donné la mort (一命呜呼 , yīmìngwūhū ; rendre son dernier souffle) dans la chambre principale, d’un coup de pistolet. La balle ressortant par la tempe, avait pulvérisé le miroir en cristal taillé et démoli son cadre doré aux angelots joufflus. Le désespéré était seul en la demeure : il avait fallu trois jours à la police, alertée par les voisins, pour forcer le portail et faire la macabre découverte.
Le fils ne laissant pas de successeur, la mairie avait mis en vente le bien, ce qui n’avait pas été une mince affaire. En dépit du prix modeste demandé, quatre millions de yuans pour un bien estimé au double à tout le moins, voire au quintuple, s’il n’avait pas été cadre de l’événement tragique, il n’avait pu trouver preneur.
Finalement, la mairie avait dû la lâcher pour une bouchée de « mantou », 400.000 yuans à un artiste shanghaien en vogue, séduit par le cachet prérévolutionnaire de la demeure, poussé par sa femme, une fille de la haute habituée au luxe, et qui savait reconnaître une bonne affaire quand elle en voyait une.
C’est qu’en Chine plus qu’ailleurs, la superstition frappait les logements ayant été le cadre de mort violente. Tout le monde aux alentours croyait que le fantôme du jeune joueur hantait la nuit les chambres et le couloir, en costume et cravate blancs, fouillant nerveusement les placards en quête de la dernière cache d’argent de son père, anxieux de retourner à sa partie de mah-jong, rêvant de voir sa chance enfin tourner pour recommencer à empocher les mises et refaire sa fortune dans la nuit.
Par les fenêtres de l’entrée monumentale, tous les voisins juraient avoir entrevu, à la pleine lune, les feux follets, les flammes froides et les bougies flageolantes faisant un halo verdâtre sur le visage blafard du trépassé. La terreur s’était incrustée dans la légende de ce bien : même les commissaires-priseurs venus l’estimer avant la vente aux enchères, avaient préféré le visiter de l’extérieur sans y pénétrer.
Après trois ans de valse-hésitation, le manoir maudit avait fini par trouver preneur, mais pas question pour l’audacieux acheteur d’en prendre possession avant d’en avoir fait vérifier l’absence d’êtres de l’au-delà : en avoir le cœur net était incontournable !
C’est là que Zhang intervenait. À 33 ans, Zhang était un ancien soldat de l’armée populaire de libération, 13 ans de service au 37ème régiment d’infanterie jusqu’à sa mise à pied en 2014, lors du grand chambardement qui avait dégraissé l’APL de près d’un million d’hommes du rang et de sous officiers.
Une fois limogé avec de maigres indemnités, l’ancien capitaine avait trouvé sans peine un poste comme chef de la sécurité d’une chaîne de supermarchés. Quelques années plus tard, quand le groupe avait déposé le bilan, miné par la concurrence du commerce en ligne, il avait monté son équipe de détectives, envoyant ses hommes déloger des squatteurs, traquer une épouse infidèle, ou retrouver un fils enfui pour échapper à une atmosphère familiale trop pesante.
Plus rarement, comme à présent, il répondait à l’appel d’une agence spécialisée, pour libérer une maison de son ou ses fantômes ayant péris par le poison, le fer, la corde ou le plomb. Pour les cas plus légers, ceux des morts naturelles ou en HLM, l’agence payait un yuan de la minute, ce qui aurait donné, pour une nuit sur place, 700 yuans. Mais dans le cas de la villa virginienne de Nanyang, avec son passé et son style grandiose, la rémunération serait plus conséquente. Pour sa mission, Zhang allait recevoir pas moins de 100 billets roses à l’effigie de Mao – 10 000 yuans. À ce prix, il s’acquittait avec conscience de son travail, visitant et éclairant les moindres recoins du crépuscule jusqu’à l’aube, en quête d’activité d’âmes de l’au-delà retournées dans le monde matériel.
La veille, nanti de sa valisette contenant sa puissante lampe torche et des effets de rechange, il avait pris son avion pour Nanyang, puis une fois à terre, avait poursuivi en taxi à l’agence, qui l’avait conduit sur place.
Tout de même, arpentant à présent son couloir à 3 heures du matin, avec pour seul guide le jet lumineux de sa torche, l’ex-capitaine se disait qu’il ne volait pas sa rémunération. Frôlé par une chauve-souris, il n’avait pu retenir un léger cri d’angoisse. Puis souriant de sa propre faiblesse, cherchant à garder une attitude impavide tandis que son cœur recouvrait son rythme normal, il avait remercié le ciel que nul n’ait été là pour découvrir qu’il n’était, après tout, qu’un simple humain, vulnérable comme tout le monde à la frayeur.
En même temps, pragmatique, il se disait que l’incident, tout bien considéré, était là pour protéger son métier de chercheur de fantômes. En effet, la terreur psychologique inhérente au job, décourageait les vocations. Parmi la douzaine de collègues dé-fantomiseurs qu’il avait rencontrés dans la carrière, la plupart avaient laissé tomber dès la première nuit, incapable de soutenir le stress de l’outre nulle part, les craquements de vieux planchers dans la nuit, ni les cauchemars dès que le veilleur tombait dans un sommeil hâve et tout sauf réparateur.
Enfin, voilà, ça y était pour cette ronde, Zhang était de retour au salon, sous l’éclairage blafard d’une lune aux trois quarts. Au loin, étouffé par la distance, retentissait le miaulement rauque d’une chatte en chaleur, le hurlement d’un chien en maraude. Zhang se rallongea sur un divan récamier défoncé, prit une rasade de thé dans son thermos, s’emmitoufla dans sa couverture kaki pour tenter de se protéger du froid pelant.
Demain à huit heures, l’agence viendrait le rechercher. Il aurait déjà rédigé son rapport, dans son style militaire succinct et efficace. La maison serait dès lors débarrassée de ses légendes et mauvais souvenirs. Place nette aura été faite pour accueillir le nouveau propriétaire, prêt à lancer les travaux de réfection de sa villa pour la restaurer dans sa gloire d’antan. À moins bien sûr que l’artiste peintre et son épouse, ne soient à leur tour happés par les crocs d’une enquête en corruption, une arrestation, un décès au cours d’un interrogatoire un peu trop appuyé… Dès lors, avec un cadavre de plus dans la nature, les fantômes reviendraient de plus belle dans le manoir. Mais si un tel clin d’œil du destin devait advenir, Zhang pourrait toujours revenir, pour refaire une fois encore son travail propitiatoire, et toucher un nouveau cachet mirifique par la même occasion !
15-23 janvier, Nankin : CMT CHINA 2022, Salon du tourisme et des loisirs de plein air.
1er février : Nouvel An chinois. Dans toute la Chine, les festivités du Nouvel an lunaire célèbreront l’entrée dans l’année du Tigre (d’ Eau) qui commencera le 1er février 2022 pour se terminer le soir du 21 janvier 2023.
31 janvier- 6 février : Congés du Nouvel An chinois.
4 au 20 février : Jeux Olympiques d’hiver, à Pékin, Yanqing et Zhangjiakou (Hebei). Tickets encore non-ouverts à la vente.
4 au 13 mars : Jeux Paralympiques d’hiver, à Pékin, Yanqing et Zhangjiakou (Hebei). Tickets encore non-ouverts à la vente.