Santé : La « Covid-19 » prend ses aises en campagne

La « Covid-19 » prend ses aises en campagne

En Chine, on avait plus vu un tel nombre d’infections de la Covid-19 depuis 10 mois. Le foyer initial se trouverait dans le Hebei, province qui borde la capitale chinoise. Pour éviter une plus grande propagation du virus, la province entière a été verrouillée et les autoroutes bloquées, perturbant le trafic logistique dans le nord-est du pays. 

Malgré ces précautions, des cas liés aux foyers du Hebei ont été retrouvés aux quatre coins du pays, du sud dans le Guangxi, à l’ouest dans le Xinjiang, au nord dans le Shanxi, et à l’est dans le Shandong. Située à la frontière russe, la province du Heilongjiang est elle aussi à nouveau en état d’alerte, avec plus d’une centaine de cas détectés. Dans le Jilin voisin, un visiteur asymptomatique aurait contaminé pas moins de 102 personnes en l’espace de 10 jours ! Sans surprise, Ma Xiaowei, directeur de la commission nationale de santé, chargé de la supervision au Hebei, affirme que les récents foyers ont tous une origine étrangère (voyageur ou produit importé), sans avancer d’élément pouvant appuyer ses dires.

En totalité, près de 700 cas confirmés et environ 500 asymptomatiques ont été recensés dans le Hebei depuis le 2 janvier, la majorité dans la capitale provinciale, Shijiazhuang (11 millions d’habitants, dépistés deux fois de suite pour repérer d’éventuels faux négatifs), avec quelques dizaines de cas à Xingtai (8 millions) et Langfang (4,9 millions). Un décès a été enregistré, le premier en Chine depuis 272 jours. Selon les autorités, le premier patient identifié au Hebei aurait été contaminé autour du 15 décembre. Le patient zéro lui, pourrait remonter jusqu’à début novembre.

Cette chronologie révèle deux choses : la première est la difficulté que posent les cas asymptomatiques, qui transmettent silencieusement le virus. La deuxième est que la Covid-19 s’est répandue pendant plus de deux semaines avant l’annonce des autorités. Ce constat aurait-il motivé le rappel à l’ordre du Premier ministre Li Keqiang début janvier, admonestant les cadres à ne cacher aucun cas ? Preuve que les vieilles habitudes ont la vie dure et que seule la version officielle de la réponse épidémique doit prévaloir : une dizaine de citoyens commentant sur WeChat le développement des foyers d’infection dans le Hebei ou le Heilongjiang, ont reçu une punition administrative de la police pour avoir propagé des rumeurs et des fausses informations

Autre trait spécifique à ce foyer du Hebei : 70% des cas déclarés sont des ruraux, et nombre d’entre eux ont assisté à des mariages ou funérailles ces derniers temps. Dans la campagne environnante de Shijiazhuang, plus de 20 000 villageois (même ceux qui ont été testés négatifs par deux fois) ont donc été évacués en bus vers des centres de quarantaine centralisés (hôtels, dortoirs d’école…), mais aussi vers un site en cours d’installation regroupant 3 000 habitations modulables (cf photo) étalées sur une surface équivalente à 47 terrains de football. Ce système n’est pas sans rappeler les hôpitaux d’urgence érigés en quelques jours l’an dernier à Wuhan. Toutefois, le sort de ces paysans a fait débat sur internet : était-il bien raisonnable d’évacuer autant de monde, sans préavis, en plein hiver, alors que toutes les structures d’accueil n’étaient pas prêtes ? « Ils ne sont pas des réfugiés », a rappelé un internaute. D’autres, au contraire, ont pris de haut ces paysans, déplorant leur manque supposé d’éducation et de discipline : « ils ne réalisent pas le sérieux de la situation. S’ils restent dans leur village, ils ont toutes les chances de ne pas respecter le confinement ». Les autorités elles avancent de mauvaises conditions sanitaires en campagne et le risque accru de « clusters » familiaux pour justifier ces mesures draconiennes. « Si la quarantaine n’est pas respectée ni mise en place correctement, elle n’aura pas l’effet escompté (briser la chaîne de contamination) », a déclaré un directeur du CDC du Hebei. D’après le Dr Zhang Wenhong, l’expert de référence à Shanghai, la situation dans le Hebei sera sous contrôle d’ici un mois, soit pour le Nouvel An chinois (12 février).

Quoi qu’il en soit, cette résurgence du virus dans les zones rurales n’aurait pas pu tomber au pire moment, le Nouvel An lunaire étant traditionnellement la période où les étudiants et travailleurs migrants rentrent chez eux. Pour l’instant, les municipalités et entreprises ne font que déconseiller tout déplacement superflu, voire inciter financièrement la population à ne pas quitter la ville en offrant coupons de réductions et tickets de cinéma gratuits. À Huzhou (Zhejiang), les ouvriers du bâtiment recevront une prime de 1 000 yuans s’ils ne rentrent pas chez eux et les commerces qui restent ouverts pendant les congés seront éligibles à une prime allant jusqu’à 100 000 yuans ! Pour ceux décidant tout de même de rentrer voir leur famille, le gouvernement travaille au lancement d’ici les vacances d’un code QR de santé unifié nationalement, évitant aux voyageurs d’avoir à télécharger celui de la province d’arrivée et d’avoir à surmonter les bugs intempestifs… Cependant, si la situation sanitaire se dégrade, la menace d’une restriction plus sévère des déplacements plane toujours.

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La ville de Pékin sur ses gardes

Assiégée par les infections du Hebei, et ayant elle-même recensé plusieurs cas de Covid-19, la capitale chinoise monte doucement en tension. Dans les résidences où vivent les travailleurs migrants, les autorités dépistent massivement et vaccinent à tour de bras, notamment les livreurs et les chauffeurs de VTC… En effet, le fait que l’un des conducteurs de Didi Chuxing teste positif au virus a conduit la firme à promettre l’inoculation de tous ses employés circulant à Pékin en une semaine, soit d’ici le 20 janvier. Ces derniers devront d’ailleurs remettre en place la bâche plastique séparant les sièges avant de leur véhicule, des sièges arrière. Tous les passagers sont également priés de scanner un code QR lorsqu’ils montent en voiture, afin de retrouver plus facilement leur trace en cas d’infection… Cependant, le leadership a démontré sa confiance en sa capacité à maîtriser la situation puisqu’il a confirmé la date du début des « Deux Assemblées » (两会) qui se tiendront à Pékin à partir du 4 mars.

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