Editorial : Au cochon, bonheur et désastre mélangés

L’année 2007 est pleine du meilleur et du pire – qui heureusement, se neutralisent. D’abord, elle est privée de «lichun» ou «saut de printemps», interférence astrale qui assure la fécondité (dit le mage). C’est donc une «année de la veuve», et pour ne rien arranger, l’année du cochon attire les catastrophes naturelles.

Et pourtant,  2007 est l’année de rêves de mariages et de faire des enfants. Rien qu’à Pékin,100.000 cochonnets/porcelettes y sont attendus – gynécologues et obstétriciens ont eu fort à faire pour contrarier la nature, retarder les 1ères naissances jusqu’au 18/02, la bonne date. Et tant pis si ces enfants seront toute leur vie en surnombre, à l’école, en université, au travail, problèmes que ne connaîtront nullement leurs amis nés l’an d’avant ou d’après, aux effectifs plus étriqués.

Partout, hôtels et restaurants à étoiles (banquets de noces en 100ainesd’euros par tête) affichent complets six mois à l’avance. Les somptueux cadeaux de nouvel an se financent à tire larigot : voiture, PC, lingot d’or, petit verrat vivant. Des fortunes se craquent en pétards compliqués. La nuit fatale, le trafic de texto passera à plus de 10 milliards. Sur les 460M de portables, des messages propiciatoires aux amis, avec images, sons et films se téléchargent du site pig.com, à 2¥/pièce. En un mois, pour rentrer au bercail, les Chinois feront 2MM de voyages dont 30M à l’étranger (100% de croissance), 159M par le train, le reste en bus.

On l’aura compris, il s’agit d’une année rarissime, la 2704ème année du système lunaire : celle du cochon d’or, dernière du cycle classique dodécannal mais première des 60 ans de l’élément de l’eau, une conjonction qui ne se reproduit que tous les six siècles. Le cochon est le plus chinois, le plus bénin de tous les signes, personnifié par Zhu Bajie, le compagnon du roi des singes, patient, modeste, bon enfant, mais qui sait à l’occasion donner du bâton—pour se défendre.

L’or de ce cochon mène tout droit à deux autres: un an d’enrichissement éclair de cette Chine usine du monde, puis les médailles des Jeux Olympiques de Pékin 2008. Avec tant de trésors sous le berceau, il aurait pu être plébiscité par le régime. Pourtant, Pékin décide (sans précédent!) de bannir toute publicité sous l’égide porcine. Sous l’explication sèche: « la Chine est un pays multi-ethnique » – il ne faut pas chagriner le Xinjiang. D’autres esprits moins simples, spéculent que Pékin espère ouvrir davantage le robinet du pétrole saoudien.

Géomancien à Hong Kong, Peter So croit lire dans les astres qu’en 2007, «tous les porcs offensent le Dieu-Président». Bigre! Le porc est l’astre du bien-être mais aussi le cousin germain de la corruption. Selon la Commission centrale pour linspection de la discipline en 2005, en banquets, voitures tapageu-ses, amantes et villas, les cadres de Shanghai détournaient 10MM². En 2006, ils étaient passés à  13MM². Cette année, le Président Hu Jintao veut «étriper», «faire la peau» à ces pratiques cochonesques non durables. Mais, nous dit MrSo à sa manière, entre ses projets et ceux des cadres, il y a inversion de phase !

 

 

 

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