Quand vient la récession et ses prix effondrés, c’est le moment pour l’Etat chinois d’acheter à bas prix les matières premières, tant pour regarnir ses réserves, que pour dépanner les producteurs. La technique ressemble à celle d’une centrale hydroélectrique en temps de crue, inversant les turbines pour détourner l’inondation—mais la centrale dépense de l’énergie au lieu d’en produire, quitte à en regagner ensuite, en vidant ses réserves en période sèche. Cependant, la manière dont Pékin le fait permet de constater une intéressante inflexion à sa politique : à présent que les besoins sont à peu près couverts, tous les producteurs ne seront plus sauvés. L’heure est à la concentration. On passe du « produire plus » au « produire mieux », et d’une liberté provinciale, à une rationalité nationale
L’aluminium est en énorme surcapacité. Depuis juin, les prix ont réduit de 52%, et le n°1 Chalco s’estime heureux de rester rentable, après disparition de 90% de ses profits. Chalco applique la consigne du Conseil d’Etat : couper en deux les hauts salaires, écornant les bas de 15%, pour tenir le coup sans licencier personne. Mais les ventes se feront à perte durant tout 2009. Le BRN (Bureau des réserves nationales) aura acheté 150.000t en décembre, 290.000t en janvier, privilégiant ainsi son dinosaure et l’aidant à racheter la concurrence. Même mécanisme pour le zinc, où le BRN achète 59.000t.
Même mur des lamentations dans l’acier: 660Mt produites en 2008, seulement 500Mt vendues (13MM¥ de pertes en déc.). Les grands (Baosteel, Shandong Steel, Hebei Steel et Angang), capables de produire le meilleur au moins cher, gardent leurs objectifs de production de 2008, laissant les petits se répartir les coupes… ou disparaître. Ici, pas question pour l’Etat de stocker. Les aides se limitent à l’export haut de gamme.
NB: les sidérurgistes chinois tentent d’imposer aux fournisseurs mondiaux de minerai 40% de baisse. Pas pressés de conclure, les mineurs misent sur l’épuisement de la montagne de minerai encore accumulée dans les ports chinois (65Mt au 31/12).
Le cuivre caracole : quoiqu’ayant tout fait pour atteindre la surcapacité, la Chine 1er producteur mondial ne suffit pas à sa demande. Aussi Jiangxi copper, le leader poursuit son plan de croissance de 12% cette année, à 0,8Mt de cuivre raffiné. Et quoique le cours ait chuté de moitié depuis juillet, il parie sur une hausse du cours de 20 à 30% (4000-4400$/t). Et le BRN a acquis, dans l’année, 211.000t de cuivre raffiné, soit +89%.
Enfin, côté céréales, seul secteur où Pékin faire monter les cours (cf Edito), on constate que la Chine a acheté l’an passé 11% de la récolte de grain, soit 41Mt—ce qui s’explique aussi, outre le souci de stabilité sociale, par la sécheresse sans précédent : 7,9Mha sont touchés entre Shandong et Shanxi, avec 70 à 90% de déficit en pluies…
Sommaire N° 3