Monde de l'entreprise : Cohue chez Costco

Cohue chez Costco

Alors que les poids lourds de la grande distribution s’y sont cassé les dents (Tesco, Lotte, Carrefour, Metro…), Costco, le roi de la vente en gros, ose à son tour tenter sa chance, inaugurant son premier hypermarché à Shanghai le 27 août. Une heure après l’ouverture, c’était déjà la cohue dans le magasin de la chaîne américaine. Entre 10.000 et 20.000 clients se ruaient sur les fameux poulets rôtis de la chaîne (cf photo), des bouteilles de Moutai à moitié prix, ou plus étonnant, des sacs à main de luxe ! Ici, la moitié des produits sont importés.

La recette du succès de Costco est basée sur une adhésion annuelle (au prix de 299 RMB) permettant aux clients d’y faire leurs emplettes à des prix de gros. Pour cela, Costco fait des économies en exploitant son entrepôt de stockage comme des rayons, mais aussi en limitant emballages et décorations inutiles. Naturellement, sa marge brute, autour de 11%, est moins élevée que celle de la grande distribution traditionnelle (20% à 25%), mais suffisante pour dégager au dernier trimestre un résultat net global de 906 millions de $.

Alors que l’on assiste au lent déclin des supermarchés au profit du e-commerce, pourquoi Costco croit-il en sa bonne étoile chinoise ? D’abord, le groupe n’est pas exactement un nouvel arrivant sur le marché chinois : il y était déjà implanté depuis 2014 par l’entremise d’un partenariat avec Alibaba, pour vendre sa propre gamme de produits Kirkland. Sa boutique sur Tmall est déjà suivie par 1,45 million d’abonnés. Cette expérience lui avait permis d’apprendre à mieux connaitre ses clients chinois. Il était aussi aux premières loges pour constater les écueils de ses concurrents étrangers, arrivés dès les années 90 mais n’ayant pas su faire évoluer leur modèle au rythme des consommateurs. C’est précisément sur leur appétit pour de nouveaux concepts que Costco mise.  Il n’est d’ailleurs pas le seul à vouloir tenter l’aventure : suivant une stratégie similaire, l’allemand Aldi, déjà présent sur Tmall depuis 2017, ouvrait en juin à Shanghai ses deux premiers magasins.

Mais passé l’effet de mode, les clients se bousculeront-ils toujours au portillon ? La plupart des marques étrangères font l’objet d’une certaine frénésie à leur arrivée sur le marché chinois, un état de grâce qui ne dure pas toujours (cf les déboires de Marks & Spencer). De plus, un magasin très fréquenté n’est pas forcément synonyme de fortes ventes. Chez le géant suédois IKEA, les nombreux visiteurs qui font la sieste dans les lits d’exposition ne sont pas ceux qui passent à la caisse. Et la Chine est grande : même si Shanghai est un succès (Costco envisage déjà d’ouvrir un second magasin dans la ville), rien ne garantit la même réussite dans les provinces, où le public est moins accoutumé aux produits étrangers. Surtout, le client chinois, converti au confort de la livraison à domicile, peut rechigner à retourner en supermarché, d’autant plus s’il est obligé d’y payer une cotisation annuelle. Cela peut expliquer la faible expansion des Sam’s Club, dans le pays depuis 1996, sous le même modèle commercial de la carte de membre. En deux décennies, cette filiale de Walmart n’a ouvert que 26 magasins et n’est parvenue à fidéliser que 2 millions de membres. Autre obstacle potentiel, les consommateurs chinois n’ont pas l’habitude des achats en gros, n’ayant pas la place de les stocker dans leur appartement. Surtout, la guerre commerciale tombe mal : le géant du discount a déjà dû remplacer nombre de ses produits américains par des avatars australiens pour maintenir ses prix bas malgré les taxes douanières. Les prochains mois seront donc déterminants pour le plus célèbre des grossistes, mais la chance ne sourit-elle pas aux audacieux ?

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