Temps fort : La femme chinoise en quête de soutien

Après 15 jours, l’affaire de Badong (Hubei), loin de se calmer, fait toujours des vagues. Employée d’hôtel, Deng Yujiao (21 ans) a été incarcérée le 10 /05 pour avoir tué un homme et blessé un autre, qui voulaient abuser d’elle. Le violeur décédé était membre du Parti et cadre de la mairie. Cela avait suffi à la police locale pour incarcérer la jeune fille sous le soupçon de « meurtre prémédité ». Sans se rendre compte de l’émotion que cette gestion machiste de l’incident libérerait, des centaines de milliers de voix sur internet, ont interpellé la justice. A Pékin, la semaine passée, une manif de femmes a eu lieu, déclarant : « nous sommes toutes des Deng Yujiao ».

Vu la tension montante, la mairie s’est opportunément rappelée (26/05) que Deng avait pris d’abord pris contact avec elle, et a évoqué ce prétexte pour la libérer (en résidence surveillée), tout en attendant des ordres.

Est-ce un hasard? A la même période à Pékin, le Parlement municipal débat de mesures de protection de la condition féminine. [1] Les travailleuses de la capitale pourraient accéder à la retraite à 60 ans, comme les hommes, et non plus 55 ans selon la loi, ce qui romprait une inégalité dans l’avancement et le volume de la pension. [2] Ce Parlement adopte un règlement réprimant le harcèlement sexuel par SMS, et permet aux victimes de se défendre en portant plainte en justice, auprès de son unité de travail ou celle du harceleur ou de la Fédération des femmes. [3] Sur les lignes de métro n°1 et n°2, s’inspirant d’une action déjà introduite à Moscou et à New Delhi, la mairie prépare, aux heures de pointe, un wagon par rame réservé aux femmes, vieillards et enfants. Ceci pour permettre au beau sexe de monter à bord de métros bondés où trop souvent, seuls les plus forts passent. La mesure vise aussi à leur éviter les attouchements, apparemment notoires.

Non encore opérationnelles, et limitées à une seule ville, de telles mesures ne font qu’effleurer un problème bien plus large, peu abordé en Chine : celui de la violence sur les femmes. Le fait d’en prendre conscience et d’agir, suggère que Pékin a été choisi comme laboratoire pour ce dossier. Ces mesures et d’autres qui suivront devraient être étendues rapidement au niveau national.

Il est grand temps : les violences contre les femmes se développent vite en Chine, sur fond d’émancipation féminine mal acceptée et d’exode rural détruisant les protections traditionnelles. À la Fédération des femmes, les plaintes sont aujourd’hui de 50.000/an, 25 fois plus que 9 ans plus tôt. En 2004, un sondage par cette organisation concluait qu’environ 100M d’épouses étaient battues en leur foyer. Cette instance dénonce l’absence de lois pour réprimer cette violence, et celle de statut légal aux ONG offrant refuge et soutien moral à ces êtres en détresse, afin de multiplier les foyers et points d’accueil encore beaucoup trop rares. Immense labeur en perspective, et qui passe, comme souvent en ce pays- par l’approfondissement des droits démocratiques !

 

 

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