Le 28 mai en Malaisie, le récent cabinet de Mahathir Mohamad déclarait vouloir renégocier des chantiers en dizaines de milliards de $, fleurons du plan chinois « routes de la soie » ou BRI (Belt & Road Initiative).
Début juin, d’autres nations faisaient de même. M. Nasheed, ex-Président des Maldives promet s’il est réélu en septembre, de contester les contrats signés par son prédécesseur pour 2,5 milliards de $ (un an du PIB de l’archipel). « Trop chers », dit-il, et qui imposent à la population un douloureux effort de service de la dette.
En Birmanie, le pouvoir veut renégocier le futur port de Kyaukpyu (cf photo), facturé 9 milliards de $ par Citic : prix très au-dessus du marché, et en cas de faillite du projet, la Birmanie craint d’en perdre la propriété comme il advint au Sri Lanka avec le port d’Hambantota – qui coûta 1 milliard de $ pour rester désert. C’est le second chantier chinois bloqué au pays d’Aung San Suu Kyi, après le barrage de Myitsone (2011) qui aurait coûté 6 milliards de $…
Aux Balkans, le FMI dénonce un « important nouveau créancier » au Monténégro, asséchant les finances du pays par des traites insupportables : l’Exim Bank chinoise, qui finance une autoroute trop chère vers la Serbie.
En Ethiopie, c’est la Chine-même qui donne l’alerte. Son réassureur Sinosure ne veut plus couvrir les prêts de ce pays qui en a déjà reçu 13 milliards de $ de 2005 à 2016. L’Ethiopie vit au-dessus de ses moyens, important le quadruple de ce qu’elle exporte, et croulant sous les projets non rentables, telle la ligne ferrée de fret Addis Abeba-Djibouti, notoirement sous-utilisée.
Aux Philippines, le Président R. Duterte a obtenu 24 milliards de $ pour une série de chantiers BRI. Selon la Banque Asiatique de Développement (ADB), le pays aurait besoin de 11,6 milliards par an pour les seules infrastructures les plus urgentes. Mais sur place, l’impatience grandit : les chantiers tardent à démarrer — peut-être par crainte chinoise de ne pouvoir mener à bien les projets dans un pays rongé par la corruption…
Manifestement, la Chine voit grandir un problème de modèle commercial. Une fois la première vague de chantiers BRI achevée à travers le monde, les pays-hôtes doivent y trouver leur compte. Pour l’heure, ce n’est pas le cas pour tous. Pour que son programme d’équipement se poursuive, la Chine va devoir d’urgence réviser les coûts de ses chantiers—souvent surfacturés par rapport à l’offre tierce, et acceptés uniquement en raison du financement. Elle devra aussi se montrer plus généreuse au niveau du roulement de la dette. On n’y est pas : le Sri Lanka vient d’annoncer un refus de Pékin de renégocier leur contrat-cadre sur 10 ans…
1 Commentaire
severy
12 juin 2018 à 15:43La Chine adore les clients qui ont les yeux plus grands que le ventre.