Hong Kong : Douche écossaise

Le 24 mai Zhang Dejiang, n°3 du régime, en charge du portefeuille hongkongais, a tenu dans la ville un discours d’une rare dureté. « Le pouvoir dans Hong Kong, a-t-il expliqué, est 100% aux mains du Chief Executive, par délégation ». Pas question pour la population insulaire d’un partage de prérogatives avec la justice ou le Parlement, ni de s’appuyer sur le « haut degré d’autonomie » garanti par le Traité sino-britannique de dévolution de 1984, pour contester Pékin. L’île doit au contraire voter au plus vite une « loi de sécurité » contre toute dissidence. Selon Zhou Nan l’ex-négociateur (ultraconservateur) du Traité, une telle loi sera le « préalable sur place, à l’édification d’une société harmonieuse ». Flèche du Parthe, Zhang invite les juges et avocats insulaires à relire la « Loi fondamentale » (votée à Pékin), qui définit les droits et devoirs de Hong Kong vis-à-vis de la mère patrie—la mini-constitution rédigée par le Parlement local (Legco), est donc absente.

Cela signifie que, à l’avenir, Hong Kong doit abandonner tout rêve d’élection au suffrage universel direct, et adopter une loi répressive de sécurité. C’est pour certains, 30 ans avant l’échéance, l’ultime étape pour faire passer le Rocher sous la formule « un pays, un système » – en faire une ville chinoise comme les autres.
Carrie Lam, patronne de la RAS, a prudemment botté en touche : si une telle loi est bien un devoir constitutionnel, la voter maintenant compromettrait une paix sociale déjà fragilisée par son prédécesseur C-Y Leung, qui s’est avéré d’une obédience à toute épreuve vis-à-vis de Pékin. Ce qui frappe dans le discours de Zhang Dejiang est qu’il est dans la droite ligne du régime, hostile à toute divergence, et ceci, quoique Zhang soit un adversaire notoire de Xi Jinping, imposé 5 ans plus tôt dans son équipe par l’ancien Président Jiang Zemin.

La visite de Zhang préparait celle de Xi du 29 juin au 1er juillet, pour le 20ème anniversaire de la rétrocession. Ce discours est interprété comme une tentative de Zhang, à cinq mois de la retraite, pour prévenir toute velléité chez Xi de faire des concessions (au nom de la discipline de Parti et de l’unicité de ton) lors de son futur passage ! La question hongkongaise est loin d’avoir fait l’unanimité à Pékin dans le passé. Deng Xiaoping dès l’origine, voulait « laisser les générations futures trouver la bonne formule » pour le retour paisible à la Chine, et Wen Jiabao, le précédent 1er ministre, plaidait pour une résolution des « problèmes de fond » de Hong Kong – la reconnaissance de son besoin de démocratie. En somme, on peut apercevoir une ligne de fracture : la RAS se retrouve au cœur d’un conflit interne du pouvoir.

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