Une drôle de paix plane pour l’instant sur la mer de Chine du Sud, dans un jeu où la Chine semble avoir pour l’instant toutes les cartes en main, suite au retournement d’alliances, orchestré par le Président philippin Duterte en octobre 2016, se distançant des USA lors d’un très médiatique voyage à Pékin, en échange de 15 milliards de $ offerts à Manille en aide au développement. Quatre mois plus tard, trois projets sont identifiés – un réseau d’irrigation, un barrage hydroélectrique et une ligne de chemins de fer de 400km Manille-Legaspi à 3 milliards de $. 30 autres chantiers sont à l’étude pour 3,7 milliards de $, en lignes ferroviaires (Mindanao, Subic-Clark), ou en réduction de la pauvreté.
Duterte vient aussi à souhaiter des missions régulières de garde-côtes chinois au sud de l’archipel philippin en mer de Sulu, de plus en plus infestée de pirates rebelles musulmans sous obédience du groupe Abou Sayyaf. Pékin réserve sa réponse – la rumeur la prédit favorable –, et a déjà consenti un prêt de 500 millions de $ pour l’achat d’équipements militaires made in China. Duterte a déjà sa liste d’emplettes : vedettes rapides, drones, lunettes de vision nocturne et armes de combat rapproché…
Ce tropisme sino-philippin tout récent se détecte aussi dans les commentaires du ministre philippin Delfin Lorenzana, secrétaire à la Défense qui affirme : « une guerre sino-américaine pour quelques récifs maritimes n’aura pas lieu ». Lorenzana critique son collègue américain Rex Tillerson, dans sa prétention d’empêcher la Chine d’accéder aux îlots artificiels récemment construits et armés : « comment peut-on empêcher d’exister ce qui est déjà là » ? C’est un reproche voilé aux Etats-Unis, de n’être pas intervenus quand il en était temps.
Cependant, le même Lorenzana, le 3 février, accusait soudain… la Chine de préparer une nouvelle base militaire sur l’atoll de Scarborough, occupé depuis 3 ans par la marine chinoise. Lorenzana de même, affirme que son pays n’abandonne pas ses revendications en mer de Chine du Sud, au nom de la Convention du droit de la mer et du verdict passé par la cour de la Haye en 2016.
Justement, l’Inde vient assurer Manille de son soutien dans cette démarche, et les USA de Trump, par la voix de son Secrétaire James Mattis, tiennent des propos fermes face à toute perspective de reprise de l’expansion maritime chinoise. Autant dire que la paix, dans cette zone, n’est pas garantie.
Sommaire N° 5-6 (2017)