Politique : En marche vers le XIXème Congrès !

En préparation du XIXème Congrès d’octobre 2017, de nouveaux hommes et de nouveaux organes apparaissent, qui risquent de bouleverser la vie du pays.

D’ici là, l’administration doit avoir été renouvelée et des dizaines de milliers de cadres réaffectés. Rien qu’à l’ANP, sur 2879 sièges, 108 sont à pourvoir, ceux d’élus ayant été limogés.

Les premiers promus évoquent un rajeunissement, une montée en compétence technique, et le renforcement du clan des fidèles du Président Xi Jinping. Parmi eux figurent Chen Yixin (57 ans), nouveau Secrétaire du PCC à Wuhan, ex-directeur au Groupe Central pour l’Approfondissement de la Réforme, puis patron du Zhejiang où il sauvait Wenzhou d’une cascade de faillites.

Secrétaire du Xinjiang depuis novembre après l’avoir été au Tibet, Chen Quanguo, 61 ans, applique la fermeté qui lui a bien servi au « Toit du Monde », en imposant le dépôt de tout passeport au commissariat, pour ne laisser sortir à l’étranger que les Ouighours « fiables ». Chen pourrait bien hériter d’un siège au Politburo en octobre.

D’autres doivent leur promotion à leur passé technocrate. Xu Qin, 55 ans, maire de Shenzhen, devient son Secrétaire du Parti. Ma Xingrui, 57 ans, ex-cadre aéronautique, devient vice-gouverneur du Guangdong. Liu Guozhong, à 54 ans, sera vice-Secrétaire et vice-gouverneur du Jilin – une rare double promotion.

Huang Qifan, maire de Chongqing, la plus grande ville de Chine (33 millions d’âmes) écope d’une voie de garage. Il paie sa coopération avec Bo Xilai, jeté en prison à perpétuité pour corruption et « conspiration politique » – Xi vient de le révéler dans un discours interne. À la chute de Bo, Huang avait sauvé sa place, grâce à ses talents d’administrateur, en préservant à sa mégapole un des taux de croissances les plus vifs du pays. Mais à presque 65 ans, son dernier poste sera à Pékin, en d’obscures officines du Parlement. Comme maire lui succède son n°2 Zhang Guoqing, servi par son âge (52 ans) et son passé de président de Norinco, le groupe industriel d’armement.

Les préparatifs du Congrès se lisent donc dans les promotions, mais aussi dans l’agenda politique en cours. Les 29 et 30 décembre, le Politburo vit les 24 collègues de Xi faire leur autocritique, suivie d’un serment d’allégeance — une séance fortement reprise par les média. Ce meeting visait à cimenter le statut de Xi comme patron incontesté d’un appareil resserré et centralisé. Il pourrait aussi jeter les bases d’un second quinquennat destiné à tout changer : la pratique politique, environnementale, et mettre fin à l’érosion de l’idéologie et de la discipline.

Autre scène les 4 et 5 janvier lors d’un sommet de la cybersécurité, dont les chefs promettent de « cultiver un environnement favorable au succès du Congrès, par une loyauté sans faille » envers le chef de l’Etat.

Dans ses vœux à la nation le 31 décembre, Xi ne mâchait pas ses mots : pour réaliser son « rêve de Chine », le pays devra « travailler dur ». Les cadres devront démontrer envers le « cœur » une « loyauté pure et inconditionnelle ». Ils ne devront plus tergiverser à « oser la confrontation » pour défendre les « intérêts centraux de la nation »,

 Xi veut également mettre en place pour mars 2018, une Commission anti-corruption d’une puissance inégalée. La palette répressive du régime est déjà fournie, avec la CCID (la police et justice interne du Parti), les polices concurrentes de la Sécurité Publique et de la Sureté d’Etat, et l’appareil judiciaire. Mais cette nouvelle commission anti-corruption sera différente, car elle sera au même niveau de pouvoir que le Conseil d’Etat – donc inattaquable ! Des branches régionales existent déjà à titre expérimental, à Pékin, au Shanxi et au Zhejiang : nommés par les assemblées locales, leurs membres issus d’instances diverses (financières, judiciaires, policières) ont des pouvoirs discrétionnaires d’arrestation, interrogation et confiscation sans passer par les tribunaux. Leur fonction pourrait rappeler celle des « Comités de Salut Public » de la Révolution française, suivant le rêve robespierriste de débarrasser à jamais de l’hydre de la corruption.

Parallèlement, une forme de gouvernance ultra-autoritaire apparaît, visant contrôle et stabilité en tous domaines. Dans les banques par exemple, les virements vers l’étranger se voient soumis aux plus sévères vérifications, dans l’espoir de freiner la fuite des capitaux.

La même volonté de remobiliser l’autorité publique, se manifeste à propos des étrangers, personnes et entreprises établis en Chine : le constructeur américain GM écope d’une amende de 29 millions de $ pour entente sur les prix, et une loi sur les ONG force ces dernières à se trouver un sponsor officiel et émettre des rapports d’activités réguliers et détaillés. De ce fait, la plupart de ces organisations se retrouvent forcées à tourner au ralenti, le temps de se mettre en règle.

Tel est l’horizon politique, à 9 mois du XIXème Congrès, suggérant une lutte sans merci avec des ennemis innombrables et anonymes, surtout lorsqu’ils sont éloignés du centre du pouvoir. Au Jiangsu, la presse dénonce une résistance silencieuse mais opiniâtre aux consignes de Pékin—trois directives du Département de l’Organisation n’ont pas été promulguées. Cette contestation locale suggère une opposition de phase entre l’Etat central, qui veut faire respecter la loi, et les cadres, pour lesquels la corruption permet de servir leurs intérêts. Mais mettre un terme à ces pratiques est le prix à payer pour bâtir une nation moderne, et Xi l’a bien compris. Seulement, les moyens qu’il met en place pour y parvenir, ont de quoi inquiéter.

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