Le 1er juin, journée mondiale anti-tabac, vit en Chine un combat furieux entre partisans et opposants (cf photo), sur divers champs de bataille. Mais la victoire n’était pas toujours là où on l’attendait.
Depuis le 1er mai, sur tout le territoire national, l’Etat oblige tout espace public à afficher ses « défenses de fumer », à interdire les distributeurs automatiques de cigarettes, et à vérifier que les coins fumeurs, ouverts à l’extérieur uniquement, n’exposent pas les passants à la tabagie passive –celle-ci coûtant au pays, de sources officielles, 100.000 morts prématurées par an.
Le projet de loi de 2014, au placard depuis, visait la tolérance zéro. Mais la dernière version qui vient de fuiter, vise un cataclysmique demi-tour : restaurants, hôtels, bars et aéroports pourraient (r)ouvrir des coins fumeurs, et la cigarette aurait droit de cité au bureau. D’où la mobilisation de 12.000 volontaires dans le pays : « mieux vaut pas de loi du tout, qu’une loi réinvitant le tabac dans les lieux publics », fulmine cet activiste.
Ceci est le résultat d’une hérésie du passé qui perdure : le producteur du tabac (Corporation nationale), est également l’Administration qui a la gouvernance et le monopole du commerce du tabac – juge et partie, donc. C’est surtout un lobby fort, de son passé révolutionnaire (Mao, Deng fumaient), qui fait valoir ses millions d’emplois (paysans, ouvriers, vendeurs) et sa puissance financière, assurant 7% et 10% des recettes de taxation – 165 milliards de $ en 2015. Jusqu’à février 2015 le vice-directeur du Monopole était Li Keming, cadet du Premier ministre Li Keqiang. Résultat : la Chine compte aujourd’hui 320 millions de fumeurs (28% de la société), dont 11% de 13 à 15 ans. 1,4 million de ces fumeurs meurent trop jeunes chaque année.
Ainsi, selon toutes les apparences, l’empire contre-attaque. Mais dans ce tableau, tout n’est pas noir. À Pékin, une loi municipale est appliquée depuis 2015, suivant les recommandations de l’OMS. En 12 mois, le tabac a reculé dans les lieux publics de 23% à 6,7% , et de 40% à 15% des restaurants. Les ventes de cigarettes ont baissé de 2,71%, et les 11% de fumeurs d’accord pour tenter d’arrêter en 2015, sont passés à 46%. Encore plus fort, un concours d’abstinence démarrera au 1er juillet : les volontaires seront encouragés par WeChat, et ceux ayant tenu 100 jours recevront des prix jusqu’à 20.000 yuans.
La bataille fait donc rage. L’OMS compte les points, réclamant l’extension de la gouvernance pékinoise à toute la nation. Et le combat reste inégal, entre les pro– et anti– au sommet du pouvoir, la plupart des actions se déroulant dans l’ombre.
Ecrire un commentaire
Vous devez être connecté pour ajouter un commentaire
1 Commentaire
severy
4 juin 2016 à 18:13Pour encourager la population ne pas fumer, l’État pourrait proposer des activités telles que des concours pour le plus gros crachat nicotineux, les ongles les plus jaunes, les poumons les plus ravagés, le cancer le plus étendu, l’haleine la plus insoutenable, la voix la plus rauque, la note de soins la plus élevée, le plus grand nombre de décès par famille pour cause de tabagie… Les possibilités sont infinies pour combattre ce fléau qui ravage le peuple et coûte une fortune au pays.