Le Vent de la Chine Numéro 36
Inusable, le 1er ministre Wen Jiabao est reparti du 2 au 8/11 en Asie Centrale et en Russie, pour une mission vibrante de sous-entendus – à fleurets mouchetés!
A Tashkent (2/11), au meeting de l’Organisation de coopération de Shanghai (OCS) entre Ouzbekistan (le pays-hôte), Chine, Russie, Kirghizstan, Tadjikistan et Kazakhstan, un projet russe, certain d’agacer les pays de l’Ouest, était discuté: un club du pétrole et du gaz destiné à favoriser les échanges entre membres, au détriment des autres acheteurs mondiaux, tels Japon et Europe.
Trois jours plus tard pourtant, à Dushanbe (Tadjikistan), Wen Jiabao signait avec sept pays un projet régional doté de 19MM$ sur 10 ans, série de routes Nord-Sud et de six axes ferroviaires destinés à «rouvrir la route de la soie » entre Mongolie, Azerbaïdjan, Turquie, Asie du Sud et Proche Orient : faire que l’Asie Centrale reçoive davantage que ses 1% actuels des échanges Europe-Asie. Un tiers des fonds sera utilisé en Chine, et près de la moitié sera financé par les cinq banques internationales de l’IDB (Inter-American Development Bank), BERD (Banque européenne pour la reconstruction et le développement), ADB (Asian Development Bank), FMI (Fonds monétaire international) et Banque Mondiale. Or, fait très remarquable, la Russie n’a pas (encore) signé ce projet sur 10 ans : avouant son manque d’enthousiasme, face à la perspective du désenclavement de ses ex-satellites!
Le 6/11, à Moscou, le 1er ministre Victor Zubkov attendait Wen Jiabao, pour renforcer les liens «stratégiques ». Dix protocoles bilatéraux, accords et déclarations d’intention furent signés, allant de la coopération monétaire au soutien réciproque des PME, en passant par l’enseignement des deux langues. De même, les partenaires avaient des raisons de se congratuler, voyant cette année leurs échanges exploser, à 40MM$ (+41%). Les deux pays visent le doublement sous trois ans.
Mais sur le fond, le bilan est moins clair—comme de coutume, entre ces deux géants aux rapports complexes. Wen Jiabao venait demander un accord de livraison longue durée pour le pétrole, l’accélération des projets d’oléoduc et de gazoduc, endormis depuis des années, et une ristourne sur les futures ventes de gaz. L’oléoduc Angarsk-Daqing serait finalement ouvert fin 2008, promet Poutine. L’accord à long terme serait «accéléré», sans plus. Moscou souhaite peu se lier les mains. Livrer ses hydrocarbures transformés, même en électricité, rapporte davantage, tout en renforçant la dépendance du voisin. Sachant que son pétrole n’aura qu’un temps, il veut sous 20 ans, l’avoir remplacé par d’autres exports, plus high tech, tel le nucléaire… Et la Chine est pour lui un marché incontournable : vu ses besoins incompressibles, exponentiels en énergie propre, il pense pouvoir lui imposer de payer le prix !
Bien conscient de sa faiblesse, Wen Jiabao est venu les bras chargés de cadeaux, 12MM$ à investir sur place d’ici 2010, et surtout, la promesse d’achat le 7/11, de deux réacteurs nucléaires de 1000MW, à installer à Tianwan (Jiangsu), succédant à deux 1ères tranches complétées cet été. Wen commande aussi une centrale d’enrichissement du combustible, pour une addition globale dépassant (sans doute) 3MM²…
Mais ce qui compte, l’accord énergétique à long terme, n’a pas eu lieu : clairement, ces deux puissances auront besoin de décennies, pour rattraper des siècles de méfiance culturelle, au nom du bien-être !
Tandis que Wen Jiabao rencontrait Vladimir Poutine, Hu Jintao lui, recevait Robert Gates, le secrétaire américain à la défense. Après cette visite, la presse titrait sur le téléphone rouge entre leurs défenses. En fait, tel le chiffon rouge face au taureau, ce gadget cachait bien d’autres thèmes discrètement abordés, telle l’inquiétude américaine, face à la montée en puissance de l’armée chinoise, l’APL, ou tel l’Iran. Faisant valoir (comme 8 jours plus tôt la ministre israélienne Tzipi Livni) qu’un Iran nucléarisé dès 2009, risquait de causer la rupture de sa route du pétrole du Proche Orient, Gates conseillait à Pékin d’aider l’ONU à contrer les rêves atomiques des ayatollahs. Sans succès : la Chine garde encore la tentation d’un deal avec le régime intégriste, pétrole contre protection vis-à-vis des sanctions de l’Ouest.
Les pays annoncèrent aussi une coopération qui devrait faire modèle auprès d’autres pays et blocs : un contrôle commun de qualité de tout aliment et fourrage, pharmacie et équipement made in China. Entre les règlements, les douaniers et services de quarantaine, une interface est presque prête, que Chine et Amérique veulent signer avant fin décembre, à la prochaine session du dialogue stratégique économique bilatéral.
Bien sûr, les puissances discutèrent aussi du Pakistan, où le président P. Musharraf venait de déclarer l’Etat d’urgence (3/11), à la fois contre ses extrémistes et contre une opposition démocratique menée par Benazir Bhutto, juste retournée de 9 ans d’exil.
Pékin comme Washington tiennent le Pakistan à bout de bras depuis sa naissance, un peu pour les mêmes raisons :
[1] contenir l’Inde,
[2] ne pas abandonner ce pays stratégique à l’influence exclusive de l’autre,
[3] depuis le 11/9/2001, faire échec à l’intégrisme, et
[4] pour la Chine, assurer sa route maritime du pétrole par un futur oléoduc de 2000km, au départ du port pakistanais de Gwadar (investissement chinois à 200M$), via le Xinjiang, permettant d’éviter un blocus toujours possible du détroit de Malacca.
Face à la crispation totalitaire d’Islamabad, qui fait curieux écho à celle presque simultanée en Birmanie, la Chine ne peut que soutenir ses deux petits alliés. Pour des raisons pratiques autant qu’idéologiques : pour préserver sa crédibilité auprès du Tiers Monde, la stabilité de la région, et soutenir des régimes militaires sous son allégeance. Mais ce faisant, il lui faut à tout prix éviter de prêter flanc à la critique mondiale, à 9 mois de ses Jeux Olympiques. Par chance, à propos du Pakistan, contrairement au cas de la Birmanie, Pékin se retrouve, avec les USA, «dans le même bateau» – Washington, qui se dit « préoccupé», maintient sa coopération et ses crédits « défense » au général Musharraf, au nom de la guerre contre la terreur : la Chine va faire de même, sans devoir redouter sur ce dossier, les foudres de Washington!
La Chine ne perd pas le sud
Contrairement au reste des nations, la Chine depuis l’antiquité, oriente ses boussoles vers le Sud. Et c’est vers l’Antarctique que s’ébranle lundi 12/11 le navire Xuelong («dragon de neige»), avec à son bord 189 savants et différents corps de métiers, pour la 24ème mission sud-polaire, la plus importante depuis 1984. T
rois équipes coexistent.
[1] Les savants qui feront leurs recherches à bord, puis durant 150 jours sur les deux bases de Changcheng et Zhongshan.
[2] Les bâtisseurs qui élargiront d’un tiers ces bases rendues obsolètes par 20 ans d’usage, et les rénover en y intégrant un garage, un entrepôt, un réseau de recyclage des déchets et eaux usées, une chaufferie, une salle de radar à haute fréquence et une citerne à fuel.
[3] Les géomètres qui fixeront sur le mont «Dome A» le site de l’observatoire de sept télescopes et un radar acoustique, à construire sous deux ans. Cette dernière mission est la plus difficile, à 4093m d’altitude par des températures jusqu’à -90°C.
Aucun coût n’a été révélé pour cette mission, qui a sa dimension politique : les nations ont jusqu’à 2009 pour établir leurs revendications sur le fond marin d’un territoire pour l’instant protégé par un traité de 1959, comme patrimoine de l’humanité. Mais avec le réchauffement global, les gisements minéraux sous la calotte glaciaire pourraient devenir accessibles…
Ouest : nouvelle Zone Economique Spéciale, à thème d’harmonie
Après avoir lancé le mot d’ordre de «société harmonieuse», l’équipe du Président Hu Jintao tente de le pratiquer. Un obstacle à l’égalité des chances, est le 户口 hukou, permis de résidence, relique maoïste qui prive le paysan de la sécurité sociale, de la couverture médicale et de l’école de qualité réservée aux gens de la ville, tout en lui interdisant de vendre ou acheter ses terres (théoriquement redistribuées tous les 15 ou 30 ans)…
C’est pourquoi Pékin crée une Zone Economique Spéciale entre Chengdu et Chonqqinq, c’est-à-dire sur la moitié du Sichuan. Chengdu a 48% de population paysanne et Chongqing 60%. Il s’agit avant tout, d’abolir le hukou et de créer les outils légaux et financiers, techniques et pédagogiques pour briser l’écart de croissance entre mondes rural et urbain. L’Etat compte contribuer par des crédits propres, mais aussi en octroyant le droit de législation locale et d’exemptions de taxe ou de subventions. La dernière de ces ZES, en 2005, fut celle de Binhai à Tianjin (TEDA), avec pour thème la réforme monétaire —l’octroi de privilèges spéciaux en matière de convertibilité. Au passage, la nouvelle zone devra bien sûr agir dans le respect de l’environnement et du développement durable (voir p.2). Autrement dit, trouver à la fois une nouvelle mentalité et un nouveau moteur de croissance, dans une des régions les moins favorisées (équipées) du pays : vaste défi – mais est-il gagnable ? On se rappelle du plan de rattrapage du grand-Ouest, lancé en 1997 par Jiang Zemin et Zhu Rongji : des centaines de MM$ plus tard, tout est à refaire…
Huit novembre, jour mondial de la presse
Tutelle des media, l’AGPP (Administration Générale pour la presse et des publications) a célébré la journée en leur assurant la protection de la loi, selon le mot d’ordre de « plus grande liberté, adhésion aux vieux principes ».
RSF, Reporters sans frontières quant à lui, a rappelé la détention de 33 journalistes. RSF admet aussi que l’AGPP reconnaît une crise montante dans la profession, victime d’agressions (un mort, des dizaines de blessés cette année), et de pressions de « groupes privés » pour qu’ils retirent leur information. Le travailleur de l’information peut se laisser aller au chantage sur l’industriel, et au publi-reportage déguisé sous les traits de l’information bona fide. Autant de progrès modestes mais tangibles vers la transparence du secteur. Mais au fond, tous ces problèmes se rapportent à un seul : l’absence (voulue) d’une loi de la presse, fixant les droits et devoirs de la profession !
Les congés payés nouveaux sont arrivés
Un an d’ancienneté = 5 jours. Plus de 10 ans = 10 jours, plus de 20 ans = 15 jours : c’est la règle (prochaine) des congés payés, traduction du concept cher à Hu Jintao de politique sociale.
Juste publié (7/11), le projet s’ajoute à l’imminente loi du travail, qui impose le contrat à l’embauche. Sous peine d’amende, le patron paiera ses hommes les jours non prestés, ou bien les «heures supp’ » correspondantes. C’est vrai, deux semaines de congés après 20 ans de maison, c’est peu : mais les masses laborieuses conservent aussi les semaines d’or fériées.
Aux dernières nouvelles, les fêtes nationale du 1er octobre et du Nouvel an lunaire demeurent, le 1er mai est réduit à un long week-end, et trois autres fêtes traditionnelles vont être chômées : celle de la « lumière pure », de la « course des bateaux dragons », et de la « mi-automne ». Dans l’espoir, pas évident, de faire disparaître ces terribles engorgements de centaines de millions de touristes mal servis et épuisés. Dans l’espoir aussi que la fête soit celle de l’homme et non celle du commerce. La Chine rejoint ainsi la France de 1936, et du Front populaire. Même si, dans ce Monopoly du loisir, le cadre sort net vainqueur, et le migrant et le paysan, les plus mal lotis… Mais à travers le monde, la Chine ne sera pas la seule à partager tel diagnostic !
Les ronds dans l’eau de la loi du travail
Applicable au 1er janvier, la loi du travail altère le paysage de l’emploi —pas toujours dans le sens prévu.
Champion national de l’équipement en télécoms, Huawei voit éclater un conflit entre direction et 7000 actifs (10% du personnel) en cours de «démission collective » d’octobre à janvier. Pour l’employé, il y a manoeuvre pour contourner la loi, qui impose « après 10 ans » le passage au contrat à durée indéterminée. Or les 7000 «Huawei» n’ont que 8 ans de maison. Pour la direction, les choses sont moins simples. De 1988 à 1999, années glorieuses, les employés reçurent salaires dorés et stock options. Puis la firme a taillé dans ces douceurs. L’action présente entrerait dans cette logique d’austérité (réponse à une conjoncture difficile), et d’équité pour calmer la rancoeur des nouveaux entrants. Il résoudrait aussi une zone de non-droit, concernant les «ponts» entre filiales et maison-mère. Les 7000 employés ont reçu 100M² de golden handshake, et seront la plupart réengagés «après test d’aptitude». La nouvelle donne correspondrait aussi à une maturation du groupe, dans un sens de « moins de salaire brut, plus de couverture sociale »…
NB : Huawei prend le risque de perdre certains de ses meilleurs actifs. Risque limité toutefois : faute de retrouver sous 6 mois sa place dans la maison, le cadre perdrait ses stock-options. Pour les experts, et l’Etat, la volonté de contourner la loi ne fait aucun doute. Le conflit n’a rien d’un cas isolé : Syndicat unique et Conseil d’Etat prédisent la publication de décrets d’application à la loi, qui feront « payer cher » (sic) la fraude aux contrevenants !
Face aux répercussions en Chine de la crise des «subprimes», et alors que la bourse reflue semaine passée de 8%, deux leaders réagissent par des « petites phrases » d’une efficacité redoutable :
Le 5/11, Wen Jiabao annonce le report sine die du Hong Kong-express, plan qui avait été publié 10 semaines avant et aurait dû ouvrir aux Chinois l’achat direct de titres en bourse de Hong Kong. Suite à quoi le HKSE (Hong Kong stock exchange) avait monté de 42%, mais après la confidence du 1er ministre, la place perd 5% en 24h. Comme cause du retard, on site la reprise du dossier par un nouveau leader – Li Keqiang, ou Wang Qishan. Mais voilà que la tutelle boursière, la CSRC, ordonne aux courtages préparant des fonds mutuels étrangers (système QDII – Qualified Foreign Institutional Investors), de limiter à 30% la part d’actions Hongkongaises : tout se passe comme si, en fait, Pékin, sentait cette place trop exposée, et la protégeait, en crevant la bulle par anticipation !
Un des signes ayant incité Pékin à réagir, est le soutien massif de Hong Kong pour maintenir sa monnaie dans la bande de fluctuation fixe (peg) avec le US$.
En octobre, pour y parvenir, la ville a dû payer 1,2MM$. Tandis que le ¥, lui, monte depuis 2005 : de 4,3% depuis janvier. Aussi l’argent chinois se rue sur la ville (l’équivalent de 16MM$ depuis l’été, de 50 à 50MM$ d’ici 6 mois). Les insulaires ont doublé en 18 mois leur épargne en ¥, à 28MM¥. A l’inverse, l’import de Chine s’enchérit, causant sur place 1,6% d’inflation en octobre. Déjà se dessine à l’horizon l’extinction du HK$ par le ¥. Des chaînes telles Nike, Marks & Spencer acceptent les 2 monnaies… Dans cette perspective, la manoeuvre de Wen Jiabao ressemble à un coup de frein prudent à une évolution planifiée, mais que l’on veut garder sous contrôle— « man-man lai », pas trop vite !
‚ Comme « étourdiment », Cheng Siwei, vice-Président à l’ANP, le Parlement, dit (6/11) que la Chine va «vendre du dollar», qui fait 70% de ses 1430MM$ de devises, et rééquilibrer ses réserves avec d’autres monnaies. 24h après, le monde entier a réagi sur les marchés, créant entre US$ et ² un écart plus vu depuis 1999 : 1,46$/1². Tandis que le Yuan lui aussi, battait un record, à 7,41/1 (8/11). Ces deux « petites phrases » de Wen et Chen, confirmant la montée en influence de la « monnaie du peuple » : en terme de monnaie désormais, quand la Chine tousse, le monde s’enrhume!
Parmi d’autres actions monétaires en cours, figurent le frein imposé aux 341 fonds mutuels, titulaires de 3300MM¥ (x3,8 depuis janvier). Tandis que la Banque centrale taxe (7/11) 662 banques dont 10 étrangères, pour infraction aux règlements sur le blanchiment d’argent. A noter aussi les 70 banques au noir débusquées, ayant brassé 3MM$. Il s’agit de la surface de l’Iceberg : l’Etat lui-même estime à 30%, la part clandestine du marché des prêts.
Plus que jamais, la lutte anti-pollution en Chine, prend les formes d’un conflit au sein de l’appareil, qui s’exporte en public, faisant foin de la discipline de Parti et du devoir de réserve.
L’appareil se divise, à propos du futur système d’évaluation d’impact écologique. Pan Yue, vice-directeur de la SEPA, l’agence nationale de protection de l’environnement, dénonce cartels et pouvoirs locaux qui « bloquent par devant, embusquent par derrière » son outil de planification, afin de maintenir la croissance anarchique actuelle. Voyant l’adoption de son système d’impact prendre du retard, ce vice-ministre de l’environnement, clairement soutenu par le tandem Hu Jintao/ Wen Jiabao, publie son brûlot au Quotidien du Peuple : à 9 mois des JO, la boule d’air argenté autour de Pékin, n’est pas étrangère à cet électrochoc. Sa démarche arrive juste après la 1ère bataille perdue par la SEPA, d’évaluation du PIB vert.
En juin, les leaders des 10 provinces et villes choisies pour ce test avaient réussi à le faire capoter, au nom du tort que faisait une telle publication à leur image, à quelques semaines du XVII. Congrès qui décide de leurs carrières.
Le système d’impact doit permettre l’examen de passage systématique de tout projet d’investissement nouveau.
39 experts sont pressentis pour dresser le bilan écologique de 5 régions (les golfes de Bohai et de Beibu, la côte face à Taiwan, la conurbation Chengdu-Chongqing), de 10 villes, telles Dalian et Wuhan, et de 5 industries (acier, carbo- et pétrochimie, papier, électricité). Leur rapport doit servir de base à des législations : c’est le « concept scientifique » que Hu Jintao vient de faire inscrire à la charte du Parti – pour imposer le nouveau cap du développement durable ! Selon cette approche, les industries polluantes à l’avenir, ne pourraient plus être concentrées mais dispersées, et leur implantation ne pourrait avoir lieu sans l’audition publique des populations concernées.
Tout ceci arrive à un mois du sommet de Bali, à 80 nations dont 36 doivent convenir de réductions contraignantes de leurs émissions de gaz à effet de serre après 2012. Or, face à cette échéance, Pékin réitère le 9/11 son refus. Réfutant l’AIE, l’agence internationale de l’énergie, qui lui prédit dès cette année le rang de 1ère pollueuse de l’air mondial, et dès 2010 celui de 1ère dévoreuse d’énergie, Zhang Yuesui, vice- ministre des affaires étrangères, rappelle le refus frontal chinois à toute baisse obligatoire d’émissions : la pollution, c’est les pays riches, les autres ont droit à la croissance. Comme par compensation, Pékin relance son système d’évaluation d’impact décrit plus haut, et annonce aussi la dernière main à 885 projets de vente de « crédit carbone», d’une valeur de 15MM$, dont 3MM$ affectés à un fonds national de développement propre. Dévoilant ainsi la stratégie de Pékin pour les prochaines années : donner autre chose, tout sauf des réductions contraignantes, pour gagner quelques années sur la patience du monde.
Arcelor Mittal trouve la paille dans le mur d’acier
ArcelorMittal remonte un courant défavorable, et s’implante malgré tout en Chine, malgré l’obstruction du ministère, et plus encore du lobby sidérurgique déterminés à résister à la pénétration du 1er aciériste planétaire sur leur marché, premier producteur et consommateur.
Ce qui n’a pas empêché l’indo-luxembourgeois, de contrôler 33% de Valin (Hunan), puis d’acquérir en octobre 90% de la câblerie privée Rongcheng (Shandong). Voilà qu’à présent, il reprend 28% de China Oriental, moyennant 647M$. China Oriental est maître des deux aciéries Jinxi (Hebei, Guangdong), fabricants de profilés, tôles revêtues et laminés à froid.
Au printemps, avec son groupe Smart Triumph, femme d’affaires Chen Ningning avait voulu contrôler China Oriental, et commencé à racheter avant de subir le tir de barrage de la direction et de Wellbeing Holdings (42% des actifs). Peu après, ArcelorMittal rachetait les parts, mal vu par le secteur chinois comme de toute l’Asie, mais assez fort pour supporter la position d’actionnaire minoritaire. On voit donc se confirmer la stratégie de Mittal, la seule possible face à la loi : multiplier les entrées minoritaires au sein des grands aciéristes chinois. Dernières rumeurs (9/11) : ArcelorMittal négocie avec Kunming Iron, l’aciérie du Yunnan. D’autre part, les palabres seraient très avancés pour reprendre 49% du mongol Baotou. Mais face à cette bouchée plus grosse que les autres, le Conseil d’Etat donnera-t-il son aval? Pour Laiwu (Guangxi), après avoir fait attendre Mittal 13 mois, il avait fait capoter la reprise de 37% du groupe, en imposant un prix supérieur.
Une autoroute privée, en Chine
Généralement, les autoroutes en Chine appartiennent aux provinces ou aux villes, voire à des intérêts hybrides, tel China Merchants (sino-HK) qui en tient cinq.
Voici donc un deal atypique, que ce rachat par le fonds MIIF (banque australienne Macquarie), 537M$ pour 81% de la liaison Canton-Nansha (le port en eaux profondes). Le consortium hongkongais privé qui cède ces actifs après 3 ans, en conserve 9%, et la province 10%. La concession a encore 22 ans devant elle.
Raison de la vente : le rendement attendu, de 8 à 9%, n’est pas assez élevé. Raison de l’achat, décrite par Gavin Kerr, le gestionnaire du fonds : le MIIF ne maîtrise pas encore bien le secteur des infrastructures en Chine (où il dispose quand même de 38% du port fluvial de Changshu, Jiangsu), et cet investissement de père de famille lui offre les garanties de stabilité nécessaires.
NB : Pour habiller son patrimoine chinois, Macquarie déshabille ses avoirs européens, en revendant ses parts dans l’aéroport de Bruxelles, et dans le stockage pétrolier TanQuid en Allemagne.
[1] Le service anti-dopage prouve son sérieux : les Jeux des villes chinoises à Wuhan (10 jours, 6000 athlètes), leur fait effectuer 1239 tests d’urine et épingler un cycliste et un wushu’iste, porteurs de traces de stimulants et d’anabolisant.
[2] Comme entraîneuse du onze chinois de football féminin, pour les JO, Elisabeth Loisel (France) remplace Marika Domanski (Suède), remerciée suite à l’échec de ses « Roses d’acier » pour la qualification en finale de la coupe du monde.
[3] Côté logistique, pour la 2de émission de billets par internet, le crash du réseau (6/11) a forcé les organisateurs à se replier sur un système de loterie, qui se passera en un lieu et temps à préciser, pour écouler les 1,85M de places de cette tranche.
Montrée du doigt après cet échec : Gehua-Ticketmaster, la JV sino-US !
[4] En une directive secrète qui a fui hors du Bocog, le ministère de la sécurité publique a dressé la liste des personnes indésirables sur les sites des JO. Il s’agit des terroristes, des membres du Falungong.
[5] Ils sont déjà 3500, les poupons baptisés au doux nom d’奥运 (« Aoyun » –on pourrait traduire par « Jeuzol »). 17 ans plus tôt, quelques milliers déjà, s’étaient retrouvés avec le petit nom de Yayun « Jeuzaz », avant les Jeux Asiatiques de Beijing en 1990 !
Entre villes et campagnes, les distances s’amenuisent, grâce à la multiplication des chemins de fer, bus et avions. La réduction des distances culturelles suit, mais à son propre rythme, et non sans une longue et dure guerre entre la tradition (les valeurs rurales séculaires), et l’espoir de mieux-être. Depuis la Chine centrale, deux incidents bizarrement identiques viennent d’avoir lieu, et qui nous font écho de ce conflit.
A la mi-octobre à Punan (Shaanxi), Mr Gao perdit son père. La presse nous le décrit comme homme de grand pouvoir local, nobliau rouge tenant entre ses mains tout son village. Soucieux de célébrer dignement l’adieu sans retour (河 梁携手, he liang xie shou, « serrer la main sur le pont du fleuve »), le cacique recruta à gauche et à droite une troupe d’opéra, et fit monter le chapiteau d’un ambitieux spectacle funéraire, alternant oeuvres lyriques et séances d’eulogies avec coryphée, choeur de pleureuses.
Par un maître du Fengshui, les dates avaient été fixées, les plus propices selon les conjonctions de la Lune et des astres. Planté à l’ouest de la demeure, le dais de toile vibrait d’un bon message, facile à visiter par l’âme encore dans les limbes, en train de préparer son envol vers le ciel. Seul petit problème : les 140 enfants du coin, dont la fête squattait la cour de récré – à cause d’elle, l’école était fermée…
Quatre jours plus tôt, des 20 au 25 octobre, Baodian (Shanxi) avait vu se dérouler un scénario sorti du même moule, mais en un peu plus hard. Pour commémorer le 1er anniversaire du départ de sa maman adorée, un autre haut personnage, appelons le Xie, avait déployé dans l’école son opéra de fortune. Comme à Punan, les classes étaient reconverties l’une en dortoir, qui en réfectoire, ou en salon de grimage.
Signe du progrès moderne, dans les 2 villages, les parents paysans osèrent se plaindre du tyranneau, qui perturbait sans gêne l’année scolaire de leurs enfants et détournait à sa propre guise ces établissements de leur fonction, s’arrogeant 生杀予夺sheng sha yu duo, « droit de vie et de mort » sur les masses, comme les seigneurs de la guerre d’avant la révolution…
Les deux villages toutefois, eurent dans cette crise, des ractions fort différentes. A Baodian, Xie, l’homme au bras long fit taire les braillards, déniant à quiconque le droit «de s’immiscer dans ses affaires de familles» : les fêtes durèrent 5 jours, pas un de moins. Il inspira telle crainte, que même le journal provincial n’osa laisser transpirer son nom.
Tandis qu’à Punan, le maire et la Commission à l’enseignement reconnurent le problème : avec Gao, on s’arrangea à l’amiable. L’enterrement fut limité aux 29 et 30/10, le rattrapage des cours fut fixé au WE suivant.
De la sorte, et dans un style de conciliabule immémorial, Punan réconcilia ses trois morales et les trois ères de son histoire : l’honneur confucéen au mort, l’arbitraire stalinien, et le paternalisme bénigne d’un Deng ou d’un Hu Jintao !
13-15 novembre, Pékin : Salon et Congrès mondial de l’industrie minière
14-16 nov., Shanghai : FHC Asia, Food & Hospitality
14-17 nov., Shanghai, CEF, Salon de l’électronique
15-19 nov., Shanghai Art Fair