Duowei, agence de presse chinoise basée aux Etats-Unis, braque un projecteur rare sur la sexualité au Céleste Empire.
Le piratage du portail canadien de rencontres illégitimes Ashley Madison, a exposé 30 millions de telles liaisons à travers le monde, dont « des dizaines de milliers » en Chine. Encore Duowei précise-t-il qu’il ne s’agit là que de la partie visible de l’iceberg.
À Shanghai, le site compte 8953 inscrits, et « plus de 1000 » à Canton, Pékin, Shenzhen et Chengdu. Cette pulsion inattendue s’avère même supérieure en Chine qu’ailleurs dans le monde : selon Duowei, la gente féminine chinoise infidèle s’élève à 4,2%, soit 0,8% de plus qu’ailleurs, et la masculine dépasse la moyenne mondiale de 0,4%, à 13,6%.
Certes, ces données sont sujettes à caution. Un très sérieux sondage auprès des cadres du Parti mis sous enquête, en recense 95% entretenant une liaison. Ce qui est incontestable par rapport au début des années ‘90, est que la Chine prude de l’époque a disparu, laminée par un raz-de-marée similaire à celui connu par l’Europe et l’Amérique 30 ans plus tôt.
Mais si le mouvement a eu lieu de façon identique, causes et cadre culturel ont été très différents. Une des causes en Chine est la pratique du mariage arrangé par les parents—voire par l’entreprise, privant les conjoints d’un véritable choix. Une autre est la finalité traditionnelle du mariage chinois : servir les intérêts du clan, tandis que celle du sexe est d’assurer une descendance. Ces deux valeurs ne peuvent qu’étouffer l’amour et le dialogue.
Joue ensuite la loi qui pénalise la prostitution, mais non les liaisons extra-maritales (longue tradition de concubines, « seconde épouse »). De même, la répression sociale de l’homosexualité fait que les homosexuels vont souvent accepter de se marier, quitte à chercher ailleurs ensuite la vraie âme-sœur.
La dernière cause est la plus surprenante – quoique bien réelle : selon Duowei, l’absence en Chine d’une foi religieuse prédominante, prive le citoyen d’un socle moral solide, d’une loi collective de ce qui est le « bien ».
En matière de conduite dans le couple, conclut le sociologue Zhang Beichuan, c’est donc la confusion et le chacun pour soi : le propre d’une société en mutation!
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