L’actualité éclaire celle qui préfère d’ordinaire l’ombre : l’Armée Populaire de Libération.
Autour de Ji’an (Jilin), elle enchaîne quotidiennement missions aériennes et parcours de chars : pour contenir des gestes de folie passagère de Corée du Nord, ou pour la défendre contre les forces « impérialistes » américaines ? Toute l’ambiguïté est là.
En tout cas, dès l’arrivée de Xi Jinping, des signes quelque peu contradictoires apparaissent, de sanction et de renforcement : l’Armée populaire de Chine, l’APL, doit perdre ses mauvais penchants (corruption et indiscipline) et se renforcer pour « mener des guerres et les gagner » !
[1] Le Code pénal militaire rédigé par le Département politique général de l’APL et le Procureur suprême, prévoit au 27/03, des sanctions pour 31 délits : reddition, trahison, espionnage, pertes (arrêts de rigueur pour perte de « 10 balles, 30 détonateurs, 30m de mèche, ou contrevaleur de 48.000$ »). On note la lutte contre la prévarication – revente de matériel à son profit.
[2] Un énième règlement tente de discipliner l’octroi de plaques blanches d’immatriculation de l’armée, lesquelles affranchissent le véhicule des amendes et des péages. Au 1er mai, ces immatriculations seront strictement réservées aux soldats d’active et interdites aux véhicules de luxe, Audi ou BMW…
[3] Les USA réagissent fortement à la dénonciation récente de l’unité 61398 à Shanghai, émanation de l’APL et de l’université Jiaotong qui lance sur internet des hackers en kaki contre les secrets d’affaires américains. Le Congrès vient de brider les commandes de matériel télécom à des firmes telles Huawei ou ZTE. Un 2nd texte attend les élus en avril, destiné à châtier les firmes convaincues d’exploiter des savoir-faire piratés : elles seront interdites de business sur sol US, et leurs actifs confisqués. Manifestement ces réactions musclées inquiètent Pékin, qui proteste, à peine la 1ère loi votée, et on peut imaginer en coulisse, des doigts tendus pour accuser l’APL de ces dégâts.
[4] A peine 17 agences chinoises maritimes fusionnées sous l’Administration Océanique, son président Liu Cigui se félicite de l’intégration des contrôles de la mer, des côtes, pêcheries et douanes : ils ont connu des « manquements, mais ça va changer ». De même à bord du bâtiment Jinggangshan au large de l’atoll James (proche de la Malaisie et à 1800 km de Canton), le contre-amiral Jiang Weilie, patron de la flotte « Sud », annonce une accélération des manœuvres en haute mer, avec l’aéronavale –40 exercices dans l’année.
Associés à des affirmations de propriété sur ces eaux que revendiquent aussi les pays voisins, ces propos ne sont pas faits pour rassurer hors frontières – ce que Pékin, en toute contradiction, aimerait aussi faire. Et pourtant, ils constituent l’embryon d’un tournant et d’une solution à la crise de la mer de Chine. Ils annoncent d’abord un renforcement de la professionnalisation et de la discipline, la fin des rivalités et de l’aventurisme des différents corps rivaux de contrôles maritimes chinois. Donc la fin possible des provocations matamores envers le Japon, pour laisser travailler la diplomatie. C’est sans doute un choix politique de Xi Jinping.
Avec Tokyo, la normalisation avance – comme si l’affrontement né durant la guerre de succession et l’affaire Bo Xilai, n’avait plus de raison d’être. Deux diplomates modérés et “nippophiles” ont été nommés, Yang Jiechi (vice-1er) et Wang Yi (ministre des Affaires étrangères). Trois rondes de négociations approchent (libre échange Chine-Japon-Corée/Sud, pollution, et Sommet). Pour la Chine, il y a urgence, du fait des coûts de cette brouille et des risques d’un avenir où les 2 pays tenteraient de s’ignorer, reniant la mondialisation en cours.
Mais pour assurer cette réconciliation, il faut que l’APL ne vienne pas gaspiller les efforts de part et d’autre, et qu’elle sacrifie ses intérêts (la conquête de cette mer) à ceux de la nation et du bon voisinage. Mais Xi Jinping le veut-il, a-t-il ou aura-t-il le pouvoir d’imposer une telle stratégie ? C’est ce que cache en fin de compte, sous l’angle militaire, sa formule astucieusement sibylline de « rêve de Chine » et de « revitalisation chinoise ».
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Jean
16 avril 2013 à 09:06En tout cas, « Rêve de Chine » ferait un très joli nom de parfum. De là à l’appliquer à la politique étrangère de l’Empire de la disctature du prolétariat du Milieu, il y a loin du pet au parfum.