Entretien avec Patricia Picot, escrimeuse de 39 ans, et paraplégique, qui participe à ses 5èmes et derniers Jeux Paralympiques.
Quel souvenir gardez-vous de vos premiers Jeux, à Barcelone en 1992 ?
J’en garde un souvenir excellent, sans doute le meilleur souvenir parce que c’étaient les premiers donc c’était magique, on découvre tout, il y a beaucoup plus d’émotions. Ceux de Barcelone étaient particulièrement réussis du point de vue de l’ambiance et de la convivialité. Les Espagnols étaient très chaleureux et à cette époque l’escrime française gagnait tout.
Qu’est-ce qui a changé depuis ce temps-là ?
L’organisation du village est globalement la même, par contre l’état d’esprit a changé, le côté festif a disparu. A l’époque ce n’était pas aussi professionnel, dans un village on trouvait un dancing, un karaoké, plein de choses pour faire la fête et les gens faisaient vraiment la fête après les compétitions. Aujourd’hui toutes ces choses-là ont disparu, on trouve des salles de sport, les gens préparent plus leurs jeux. Les gens sont là pour faire des résultats. Chez nous c’est quand même plus convivial, les athlètes sont plus accessibles. Les primes aux médailles alignées sur les valides, donc les athlètes sont à fond dans leurs jeux. Aujourd’hui aussi, les apparts sont en Wifi, donc chacun est sur son ordi, on trouve moins d’ambiance. Avant on avait beaucoup moins de contacts entre milieu valide et handisport.
Est-ce que les conditions et réglementations pour le handisport se sont améliorées ?
Oui, on a accès à une convention d’insertion professionnelle CIP qui permet à l’entreprise qui la signe de recevoir de l’argent et de la reverser sous forme de congés pour nous libérer du temps.Ca c’est des choses qui n’existaient pas il y a 20 ans. Mais tout le monde n’y a pas accès, mais il y a beaucoupo plus de facilités. Au niveau international il y a beaucoup plus de concurrence, beaucoup plus de difficultés, ça demande de mettre en place des systèmes d’entraînement plus évolués, de trouver des partenaires de haut niveau chez les valides souvent. Mais c’est toujours à nous de trouver des moyens d’entraînement. Contrairement aux valides nous n’avons pas encore accès aux pôles espoirs par exemple. Mais on continue à galérer pour trouver des moyens de s’entraîner, pour trouver des moyens de financement pour partir à l’étranger. Il faut tout gérer sa préparation physique, les déplacements, le côté financier mais on ne s’occupe plus du temps qu’on doit trouver.
Vous sentez-vous plus reconnus ?
Reconnus, dans l’entreprise on est reconnus comme athlètes de haut niveau. Les journaux régionaux nous suivent. On en parle beaucoup plus qu’avant, ça évolue doucement dans le bon sens. Ce qui n’a pas évolué, c’est la couverture télévisée. En France on en est toujours à quelques minutes de rediffusion, à droite à gauche. Le public oit aller chercher l’information, alors que dans d’autres pays on leur apporte l’information.
Le niveau est-il vraiment plus élevé ?
Oui, ça s’est fait par étapes. En 1992-1996, la France était devant. Puis il y a eu les pays de l’Est avec la Pologne et la Hongrie et là il y a l’arrivée de la Chine en escrime pour 2005 qui amène une autre escrime et ce sera à la Chine de s’adapter. Pour moi j’ai dû me bagarrer pendant 2 ans pour rester dans les 12 premières internationales pour avoir le droit de partir à Pékin.
Qu’est-ce que ça fait de disputer ses derniers jeux ?
Pour l’instant je n’ai pas encore commencé mes jeux. Ce qui va me manquer c’est de ne plus voir les autres athlètes des autres disciplines, j’aurai un peu de nostalgie à quitter ce milieu. Depuis 20 ans, ma vie est organisée sur un calendrier sportif, sur des déplacements et des objectifs. Je vais retourner travailler à plein temps, redevenir comme M et Mme Tout le Monde, il faudra se réhabituer.
Propos recueillis par Hélène DUVIGNEAU
Crédit photo : Laurent Baheux
Question :
En cette journée anniversaire des Jeux Paralympiques de Pékin 2008, quel bilan peut-on tirer ? L’enthousiasme autour de ces jeux est bien moindre qu’il y a quelques semaines lors de la prestation des valides : pendant ces JP, les stades étaient affreusement vides, les sponsors peu nombreux, et les médias se sont désintéressés pour la grande majorité aux performances des athlètes. Pourtant ce ne sont pas les records et les médailles qui ont manqués !
Ces exemples montre bien le travail à parcourir pour faire accepter le handicap dans nos sociétés…
Et vous chers lecteurs, quel est votre avis ? Avez-vous suivi ces JP ? Qu’en avez-vous pensé ?
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