Un procès exemplaire voit son dénouement : celui de Hu Wanlin, » médecin » autodidacte de 51 ans sur l’image duquel la société se divise – diable pour les uns, bouddha pour les autres. Jusqu’à janvier 1999, les patients se pressaient par centaines aux portes de sa clinique de Shangqiu (Henan), au nom messianique de la « Santé Rendue« , espérant y trouver l’ultime recours là où le système médical déclarait forfait. Hu les traitait avec un remède unique, renforcé d’imposition des mains et de qigong.
D’emblée, une série de guérisons incroyables devait susciter son aura de faiseur de miracles. Mais les morts aussi s’accumulaient, causant la fermeture de sa 1ère clinique en février 1998 à Xi’an, puis son arrestation à Shangqiu en janvier 1999, suite au décès du maire entre ses mains.
Devant cette affaire complexe, le juge a émis un verdict de Salomon : 15 ans de prison – un de plus que celui par lequel il avait commencé sa vie d’adulte (il avait purgé 14 ans pour meurtre, dans le Xinjiang). 15 ans pour un bienfaiteur, c’était beaucoup. Mais pour un homme ayant 146 morts douteuses sur la conscience, c’était peu : en cas d’homicides multiples, la jurisprudence chinoise s’inspire plutôt de la loi du Talion.
Les hauts responsables du ballon rond n’en dorment plus : parmi les 3000 équipes de 90 villes qui viennent de s’inscrire au Championnat junior 2000, division A (bientôt à Canton), il ne s’en est pas trouvé une seule à être composée exclusivement de filles. Qui donc va assurer la relève de l’équipe nationale féminine, qui avait défendu les couleurs chinoises en juillet 1999 en finale face aux Etats-Unis ?
» Aujourd’hui, les filles ne font du sport que pour maigrir « , soupire un professeur de gym, déçu de voir « ses » lycéennes de 13-14 ans ne rivaliser que de régimes, pour gagner des concours de beauté. Cet incident traduit une mutation rapide des moeurs.
La jeunesse (féminine, ici) est toujours dans la course, mais la course a changé, de valeurs d’hier perçues comme ringardes (dépassement de soi, discipline collective), vers celles de l’individualisme matérialiste : hédonisme, glorification du corps-objet, dont la vertu se mesure à sa capacité d’attirer hommes, argent et plaisirs.
Sommaire N° 32