Jusqu’à l’été, la cohorte des diabétiques chinois était évaluée à 43M, « moins que l’Inde ». Mais une enquête du Journal Médical de Nouvelle Angleterre vient de faire exploser le chiffre à 92,4 millions (type2), 9,7% de la Chine de plus de 20 ans. Le diabète frappe les nouveaux citadins suite à des décennies d’alimentation trop riche et sans exercice.
En Chine comme en tout pays émergent, le mal va s’aggravant. 10 ans en arrière, il apparaissait à la 40aine, mais s’attaque désormais aux 30naires. Une fois atteints, pour prévenir cécité et infarctus, les victimes doivent tripler leurs frais de santé par rapport aux sujets sains. Ce qui, de 2005 à 2015, coûtera 558MM$, prédisait l’OMS dès 2008, au- tant que le stimulus financier injecté par l’Etat à l’hiver 2008, en défense contre la crise.
Or, dit le professeur Ji Linong, de la société nationale contre le diabète, on n’en est qu’au début d’une épidémie, visant les 200millions en surcharge pondérale, les 60millions d’obèses, et surtout les 60% de diabétiques qui ignorent leur mal et ne se soignent pas. D’ici 2030, la Chine qui « truste » 30% du chiffre mondial, pourrait passer à 40%, sauf réaction immédiate des pouvoirs publics.
Le problème n°1 est celui d’une société aux croyances nutritionnelles fausses, où l’embonpoint a valeur de vertu confucéenne. Problème d’ignorance aussi : parmi les 50% de malades détectés qui se soignent, seuls 1% pensent à prendre, en plus de l’insuline, des anti-cholestérols et 13% de l’aspirine, qui réduisent de moitié les risques d’accidents. Jusqu’au printemps 2010, le charlatan Zhang Wuben prétendait guérir le fléau moyennant 3000¥ et un régime à l’aubergine crue et au haricot mungo…
Le ministère de la Santé vient de lancer deux campagnes anti-diabète.
[1] Le 5/10, 1000 experts ont été lancés dans 20 villes pour former les médecins à la gestion du glucose.
[2] En un plan sur trois ans, 100.000 médecins sont en formation au dépistage, à la prévention et au traitement du diabète, au moyen de conférences, stages, et d’un portail internet destiné à toucher 400.000 soignants et malades.
En cette action à long terme, la réforme de la santé publique joue son rôle, subventionnée de 320M¥ aux hôpitaux de 16 villes, rendant le soin de santé plus abordable.
Sur place depuis 10 à 20 ans, les ténors de la pharmacie mondiale s’apprêtent à se livrer, à coup d’investissements en dizaines de millions de $ la «bataille de Chine» pour ce marché captif quadruplé depuis 2001, ayant atteint cette année 6,9MM$ de ventes.
Le danois Novo Nordisk (n°1 pour l’insuline) tient 67% du marché avec deux usines à Tianjin-3000 emplois et vient de doubler son centre de R&D pékinois à 200 chercheurs. Depuis Suzhou, Eli Lilly occupe 13,9% du marché et ouvre à Shanghai un centre de R&D de 100 chercheurs. Sanofi-Aventis investit 90M$ dans le renforcement de son usine pékinoise d’insuline à une capacité de 50M de doses. Il accélère la formation de médecins : 10.000 en trois ans, deux par hôpital-cible. Par cette méthode, Aventis progresse le plus vite, et vise 2MM² de ventes en 2015 …
Mais attention, dans cette course au gros lot diabétique, ne gagne pas qui veut : Glaxo-Smith-Kline et Eli Lilly le savent, eux qui viennent de perdre la licence en Europe ou aux USA pour leur remède antidiabétique, fruit d’années et de MM$ de R&D. Or, pour ces maisons, ce pari chinois doit permettre de compenser la perte de brevets en cours de passage dans le domaine public—elles jouent gros !
Sommaire N° 38