A la loupe : Un TGV sino-planétaire?

En marge du Parlement, Wang Mengshu, professeur à Jiaotong (Pékin), dévoile une idée extraordinaire en cours de réalisation, qui en dit long sur la fébrile inventivité de ce pays, et sur sa capacité à générer des projets transversaux entre des territoires et des champs économiques sans aucun lien jusqu’alors.

Le concept, échanger une technologie contre des richesses du sous-sol, est déjà pratiqué dans des pays tels Gabon ou Congo mais pas encore vraiment validé, faisant prendre à la Chine des risques réels sur ses investissements, ce dont elle n’a cure.

La Chine prétend cette fois exporter son TGV à 17 pays d’Asie du Sud-Est et d’Asie Centrale.

Une ligne évidente, et la plus avancée dans les négociations, est Kunming-Singapour via Vietnam, Thaïlande, Birmanie et Malaisie, suivant la fameuse piste Stillwell par laquelle les USA approvisionnaient le Kuomintang dans les années 1940.

Partant d’Urumqi, une 2de ligne, véritable TGV pétrolier irait au Turkménistan via Kazakhstan et Ouzbékistan, avant de poursuivre ultérieurement sur Berlin.

Au départ de Harbin, la 3ème doublerait le Transsibérien à tous les sens du terme, à travers la Russie jusqu’à Berlin encore. Toutes ces lignes feraient au moins du 200km/h, et des pointes à 350km/h. La Chine aurait là la plus formidable des économies d’échelle et un marché de milliers de rames en perspective—elle fournirait à peu près tout, sauf les rails.

Et les pays bénéficiaires, souvent insolvables? Ils paieraient en minerai ou autres, telle la Birmanie qui troquerait son TGV contre des fournitures de lithium. Wang précise que les négociations multilatérales en sont au «stade technique». Un des problèmes étant l’exigence de certains pays, tel Kirghizistan, de conserver leur écartement de rails propre, ce qui est impossible : problème déjà réglé au Vietnam.

Les minéraux reviendraient en Chine via un réseau ferroviaire asiatique de 81.000km, en discussion depuis 2006 avec 28 pays. Ce projet est visionnaire, en fournissant à chaque partie ce qui lui manque, tout en liant les pays par une dépendance technique et financière envers la Chine: la Chine jette les bases d’un empire! Envers de la médaille du TGV chinois: les compagnies aériennes se plaignent d’une concurrence fatale pour elles sur toute route en dessous de 500km. Liu Shaoyang, Président de China Eastern, milite pour une « raisonnable division du travail, évitant le gaspillage de ressources, y compris de terres arables ».

Ce qui peut éclairer le projet d’Alstom, le groupe français du TGV, de participer à l’équipement et à l’entretien du réseau -intérieur, pour commencer. Car la Chine qui détient déjà 3300km de ligne à haute vitesse, prétend disposer sur son propre sol de 18.000km de TGV d’ici 2020—plus de la moitié du réseau mondial, moyennant 60MM²/an dans les trois ans à venir. Or Alstom, avec ses cinq JV chinoises et son nouveau train AGV détenteur du record mondial de vitesse commerciale (360km/h), est bien placé pour soutenir la compétition.

 

 

 

 

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