Cette fois ça y est, la récession atteint les rivages chinois. Peut-être inspiré par la chute du PIB au 4ème trimestre à 8,9%, le Fonds monétaire international – FMI (05/02) rogne ses prévisions de croissance pour 2012, de 9 à 8,25%, tout en avertissant que, l’euro dût-il s’effondrer, cette croissance chinoise perdrait 50% (à 4% donc), et des dizaines de millions d’emplois. Ce qui explique l’annonce par le 1er ministre Wen Jiabao d’une action « imminente », lors du sommet Chine-Union Européenne du 14/02, de refinancement des fonds européens, MSE (Mécanisme Européen de Stabilité) et FESF ( Facilité Européenne de Stabilité Financière).
Cette fin de 20 ans de fièvre hors contrôle, tient fort au volontarisme d’un pouvoir soucieux de prévenir l’éclatement de la bulle. Bridées, les banques n’ont offert que 1.260 milliards de ¥uan de prêts immobiliers (-38%), dont le secteur n’a occupé que 17,5% des encours, contre 26,9% en 2010. Depuis septembre 2011, le prix du logement baisse en douceur, -0,26% en décembre 2011, -0,18% en janvier 2012.
Durant le Chunjie, temps des dépenses, les ventes n’ont crû que de 16% (75 milliards de US$), le moins bon résultat depuis 2009. Faute d’argent à dépenser, tous les marchés baissent, même ceux des valeurs refuge, tel celui du vin de garde (-40% en décembre), ou de l’or (-60% sur les imports depuis Hong Kong).
Pour l’avenir, l’Etat ordonne aux quatre grandes banques, via leur actionnaire Huijin, de réduire leurs dividendes à 35% des profits (-5%), pour pallier des cascades de mauvais prêts, surtout des provinces surendettées (-1656milliards de US$ en juin 2011). L’import de pétrole va poursuivre sa décélération à +6%, approchant une croissance étale, pour atteindre 266 millions de tonnes, face aux 220 millions de tonnes extraits localement. C’est ce qu’espère Pékin — en cela, la crise l’aide, en réduisant l’appétit de ses industries. D’ici 2015, le Conseil d’Etat planifie une hausse des capacités de raffinage de 25% à 600 millions de tonnes. Il s’apprête à enterrer des centaines de PME (privées) et à parachever sur la côte quatre bases pétrochimiques (publiques ou JV), socle d’une industrie plus performante. Ce plan envisage 5,5% par an de croissance de la pétrochimie, mais 8% pour celle du PIB : la différence entre les deux, sera dans les économies d’énergie et de pollution !
Toutes les PME souffrent, pas seulement celles du pétrole, des milliers n’ont pas rouvert à l’issue des congés de Chunjie. D’où risque de colère sociale. L’Etat débloque 2,5 milliards de US$ (c’est très peu) en prêts, baisses de taxes, et promet des miettes des marchés publics. Il s’engage (08/02) à assurer +13% (moyenne) aux salaires minima, et 45 millions d’emplois neufs, pour les migrants (25 millions), jeunes et ex-employés des PME en faillite.
Il entend aussi réamorcer l’immobilier en rouvrant le robinet du crédit au 1er logement. C’est important, pour prévenir l’implosion (une fois son explosion évitée l’an dernier) de la bulle du logis. Il prévoit aussi « des fonds » supplémentaires aux HLM subventionnées, et demande aux provinces d’assurer leur part du financement réel des chantiers.
De la sorte, s’esquisse sous nos yeux une tentative d’atterrissage en douceur de l’économie, pour un redémarrage (prédit par le FMI) dès 2013. Mais attention, la convalescence reste fragile. La preuve : le peu de crédits bancaires saupoudrés en décembre 2011 a été suivi en janvier 2012 d’un sursaut d’inflation (+4,5%), pour le Chunjie… Décidément, entre la lutte contre chômage-récession et celle contre surchauffe-inflation, la marge de manoeuvre de l’Etat reste très étroite !
Sommaire N° 5