En résultats conjoncturels, février bat les records à la baisse, sous le jeu croisé de facteurs tels les subprimes, et un hiver séculaire. L’inflation a atteint 8,3%, record en 11 ans. Et encore, dit la Banque de Chine, l’emballement n’a pas encore pris en compte l’effet de la pénurie, suite au gel de dizaines de M hectares de cultures: les petites gens voudront se protéger de la flambée des prix par des achats de panique. Comme le font les grands groupes: à l’heure du pétrole à 111$/ baril, la CNPC, la compagnie nationale pétrolière, négocie fébrilement 1,2MM$ de réserves d’or noir en Irak. Sinopec réserve pour 557M$ de gaz australien en mer de Timor (60% des parts). Or, parallèlement à cette flambée, février accuse une chute des 2/3 du surplus commercial: il n’atteint plus que 8,6 MM$, contre 23,7MM$ en 2007. L’import s’est emballé à +35%, mais l’export a presque stagné, à +6,5%, voire a reculé de 5%, vers les USA. Et le ¥uan à 7,1$ (contre 8,3 en juillet 2005) n’arrangera rien.
Les prix industriels ont monté de 6,6% : record de 3 ans, forcés par la hausse du brut (+37,5%), de l’acier (+29,6%). Imposé en janvier, le gel des prix n’y peut rien -les industriels préfèrent produire moins. Les patrons coréens quittent la Chine : 103 PME rien qu’à Jianzhou (Shandong). Le ministre de l’emploi annonce une année tendue,qui ne créera que 12M de jobs pour 23M de nouveaux demandeurs d’emplois, contre 24,4M en 2009, et 13,3M en 2020, fin de la crise des « enfants de Mao », selon Daniel Xu / Ning Ding, chercheurs à Taiwan.
La bourse ne fait pas mieux : -13% depuis janvier, et China Railways, n’ayant gagné que 26% au 1er jour à Shanghai, et 12% à HK, fait les pires score de l’année. Les experts sont formels : en 2008, la croissance devrait perdre jusqu’à 2 points, atterrissant vers 9,4%.
Ce noroît pourrait bien combler d’aise les autorités. Car rien de tel pour refroidir une fièvre vieille d’années, qui résistait à toutes les médications, sous l’indiscipline des provinces et des industriels. Du coup, avec le retour de l’export au raisonnable, s’éloigne le spectre de la guerre commerciale avec Europe, USA etc. Grosses énergivores-pollueuses mais petites employeuses, les industries lourdes vont reculer au profit d’une industrie et de services destinés aux Chinois. Les surcapacités vieillottes en cimenterie, chimie ou métallurgie vont fermer -libérant des bras pour l’exode vers la ville, un travail à meilleure valeur, une exportation plus chère.
Seule ombre : le ¥ sous-évalué, au taux d’intérêt de 7,47%/an, face aux 3% du US$. Les réserves monétaires ne cessent de gonfler (1590MM$ fin janvier), et l’ex-chef statisticien Li Deshui estime à 500MM$ les fonds étrangers entrés en Chine pour profiter de cette différence de taux et d’une tempête boursière moins grave qu’ailleurs.
Face à cela, la Chine va rehausser encore son taux (rendre l’argent plus cher), et parle d’ouvrir aux investisseurs locaux l’accès direct aux bourses de HK (vieux projet), et d’autres places comme Londres, Tokyo ou Singapour… Pékin doit absolument drainer le marécage de son trop abondant crédit. Sous peine de voir l’investissement forcené redémarrer, comme un incendie mal éteint par un trop bref orage !
Sommaire N° 10