Conçu en 1996 comme un « machin » (aurait dit le Général de Gaulle), le sommet de l’ASEM (Asia-Europe Eco. Meeting), ces 24-25 octobre à Pékin, se trouve soudain un sens et une mission d’urgence. Puisque les USA et le dollar, par leur pratique financière, viennent d’infliger au monde des dégâts dignes de ceux de 1929, Il appartient à ce forum de 30 langues d’Asie et d’Europe, ensemble, de reforger un système monétaire planétaire plus crédible et fiable. Les 45 pays concernés ne s’y sont pas trompés, dépêchant 38 leaders nationaux, record historique !
Ce sommet sera truffé de huis-clos aux agendas denses, espérant produire des positions communes euro-asiatiques. Avant l’ASEM, un sommet des 27, à Bruxelles (16/10) négociait en interne la refonte du système monétaire mondial. D’ici décembre, un G8 mondial doit en valider l’offre. A Pékin, Angela Merkel, chancelière allemande, prétend faire ébaucher entre les 45 une Constitution financière mondiale et une discipline unique aux aides d’Etat.
Un effort analogue est attendu, à propos du Protocole de Kyoto-II devant entrer en vigueur en 2012 (effort contraignant, librement consenti par les nations signataires, de réduire de moitié jusqu’à 2050 leurs émissions de GES) ; ainsi que sur la prochaine version de convention de l’OMC: ici, Serge Abou, ambassadeur de l’UE, croit « probable » un rapprochement, entre ces deux continents aux plus grands besoins d’un renforcement du cadre d’échanges commerciaux, afin de faire échec au spectre du protectionnisme. Entente sur de multiples concessions mutuelles, qui permettrait aux 137 Etats membres de l’OMC de parapher à temps, d’ici décembre la « ronde de Doha » en panne depuis des années.
D’autres débats visent un renforcement des transferts de ressources et de savoir-faire, pour enrayer la pénurie alimentaire et énergétique, sensible partout sur Terre mais surtout chez les pays les plus pauvres. Ici, on s’aperçoit qu’un sommet peut en cacher un autre : avant sa clôture du 25/10, l’ASEM verra se tenir en sa marge, une séance spéciale de l’ASEAN, à l’initiative de la Présidente philippine Gl. Arroyo. Une multitude de bilatérales auront aussi lieu, entre Hu Jintao et N. Sarkozy, entre Hu et Taro Aso, le 1er ministre nippon à peine nommé.
Soulevons enfin ce détail curieux : le forum n’a pas d’agenda formel. Renseignements pris, ce sont les leaders qui n’en veulent pas. Pour une raison tout à fait humaine : ils préfèrent se voir sans ministres, ni sherpas, pour deux jours d’escapade. Cette recette est à la fois leur raison profonde d’aller au rendez-vous, et leur chance de faire oeuvre féconde : sans autre garantie que leurs talents propres et créativité – les artistes seuls sous le chapiteau, jouant pour eux mêmes.
Sommaire N° 33