Après les déboires de la torche Olympique à Londres (7/04), Paris (8/04, 5 extinctions), voire San Francisco (9/04) ou Buenos Aires (11/04), la crise du Tibet s’essouffle. Partisans des droits de l’homme à l’étranger, et pouvoir socialiste campent sur leur position. La seule question de fond désormais semble être : Pékin préférera-t-elle le compromis, et dialoguer avec le Dalai-Lama comme le lui demande l’Ouest, ou bien risquer des Jeux Olympiques sous tension (cf. rubrique «politique»).
Pour l’heure, la Chine tente de changer de sujet : pour ceci, le Forum de Bo’ao (11-13/04, Hainan) est l’idéal, avec son parterre de célébrités (Ban Ki-moon le Secrétaire général de l’ONU, J. Chirac, T. Blair) et de chefs d’Etats de tout niveau (Pakistan, Qatar, Suède). L’existence même de ce forum asiatique, depuis 2001, est un succès : Pékin a su imposer au monde « son » propre Gotha mondain de la finance, de l’industrie, de la politique.
Mais pas que mondain. Un enjeu s’y joue: les accords bilatéraux de libre échange (ALE) vont-ils primer sur le round global de l’OMC (Organisation mondiale du commerce) à Doha enlisé depuis des lustres? Pékin semble miser sur les ALE, et la négociation avec chaque état séparé (plus petit qu’elle) plutôt qu’avec les blocs comme l’Union européenne (UE) ou les USA- les seuls plus gros qu’elle!
Avec la 1er ministre Helen Clarke, l’ALE sino-néo-zélandais fut signé le 7/04, 1er pays de l’OCDE (Organisation de Coopération et de Développement économique) à sauter ce pas. Cela se fit dans la discorde: son propre ministre des affaires étrangères W. Peters crie son hostilité. Certes, l’accord procurera aux insulaires 180/280M$ de marché neuf (sur des échanges de 7,5MM$ l’an passé). Mais la Chine parvient à garder 4% de ses tarifs douaniers!
A Pékin et Bo’ao (9-13/04) Kevin Ruud, le nouveau 1er ministre australien doit arbitrer le problème du minerai dont la Chine est 1ère cliente. Australie et Brésil viennent d’imposer des hausses de 70%. Pékin veut se protéger en faisant racheter par son aciériste Baoshan 9% du minéralier BHP-Billiton. Ruud veut « l’amitié » avec la Chine et surtout, la conduire dans le camp des 37 pays ayant promis de réduire leurs émissions de gaz à effet de serre… Ce qui suppose, en retour, des concessions: tel cet accès réclamé par Pékin, aux bases minières australes! Les pays ont convenu d’un rendez-vous annuel de coopération environnementale-à suivre.
A noter en tout cas le remarquable discours de Ruud aux étudiants de Beida, en chinois, autour des relations entre Chine et monde : en une audacieuse rupture, il osa récuser le terme d’«ami» (朋友, pengyou), traditionnellement octroyé par la Chine à ses partenaires étrangers, qui les ligote de facto en un terrain « poli » d’acceptation et de silence. Ruud y substitua le terme du VII. siècle avt JC, d’«ami critique» (諍友, zhengyou), définissant celui qui ose aider l’autre -au risque de l’importuner- à surmonter ses faiblesses.
Signalons encore, à Bo’ao, la rencontre de Hu Jintao avec le prochain n°2 de Taiwan Vincent Siu, et avec Michelle Bachelet, la Présidente chilienne. En addendum à leur ALE de 2005, ces 2 pays signent un accord sur les services (tourisme, transports, telecoms, finance) : renforçant des ponts entre pays émergents et Chine, et sautant les canaux des puissances, Europe, Japon et USA !
Sommaire N° 13